La biodiversité est aujourd'hui l'un des maîtres-mots de tout discours environnemental. Après une trentaine d'années de diffusion du terme, un examen attentif fait pourtant apparaître que son succès médiatique s'est accompagné d'un affaiblissement scientifique. Ont surgi nombre d'arguments qui s'éloignent des faits avérés ou des analyses sérieuses, conduisant ainsi à un catastrophisme ambiant mal fondé.
Alain Pavé, dont la compétence scientifique dans le domaine est incontestée, propose une analyse critique novatrice et bienvenue, riche d'exemples concrets souvent surprenants, de l'escargot de Quimper à l'ours pas toujours blanc.
Loin de prendre le simple contre-pied des idées reçues et d'ouvrir la voie à un quelconque écoscepticisme, l'auteur montre que la prise en compte des réelles menaces qui pèsent sur le vivant demande une compréhension beaucoup plus fine de sa diversité et des mécanismes, évolutifs en particulier, qui la gouvernent et où l'aléatoire joue un rôle déterminant.
Il s'agit ici rien moins que de proposer une refondation du concept de biodiversité, à la mesure de son importance et de l'intérêt qu'on doit y porter. La pensée écologique ne pourra que profiter de ce changement de perspective.
Comme la gazelle face à son prédateur, les êtres vivants sont soumis au hasard et l'utilisent.
Hasard de la rencontre, hasard de la course pour éviter d'être mangés. Aléas de l'environnement, hasard pour survivre. Plus généralement, quelles sont les différentes facettes du hasard ? Est-il favorable ou défavorable ? Quelles sont ses origines ? Quel rôle joue-t-il ? La vie et son évolution sont-elles tout simplement possibles sans hasard ? La biodiversité n'est-elle pas une fille du hasard ? Autant de questions qui sont abordées dans ce livre et qui montrent que le rôle du hasard est primordial : il n'est pas un phénomène parasite, mais bien souvent nécessaire au bon fonctionnement des organismes et des écosystèmes.
Il est même un moteur essentiel de l'évolution biologique. Mettre le hasard au coeur du vivant prépare une sorte de "révolution copernicienne" dans les sciences de la vie. De plus, la science n'étant pas isolée du reste de la société, de l'économie, des cultures,.. Quelles sont les conséquences de ces imprégnations multiples ?
Le métier de modélisateur, celui de l'auteur, est au carrefour des recherches méthodologiques, biologiques, écologiques et même sociologiques. Il s'effectue aussi bien au laboratoire, que sur de grands terrains, comme l'Amazonie. Il met en oeuvre une interdisciplinarité devenue nécessaire pour la recherche scientifique de notre temps. Il permet de mieux aborder beaucoup des problèmes majeurs posés par les sciences. Intégrer une réflexion épistémologique s'avère alors importante, par exemple pour juger de la pertinence du thème « biodiversité », de son usage dans la recherche scientifique, pour analyser les fondements et les ressorts de l'écologie qui se l'est appropriée, d'apprécier l'énorme difficulté de l'exercice, de ce qui est possible ou inaccessible, voire même impossible, d'évaluer de la fragilité ou non du concept et enfin de porter un regard critique sur sa propre méthodologie. Cette compréhension est un atout majeur pour guider le travail scientifique, pour baliser l'activité personnelle et collective, pour animer des groupes et des programmes de recherche.
Le hasard est essentiel aux systèmes vivants et à leur évolution. C'est un facteur externe, mais aussi et surtout le produit de mécanismes internes ; on le retrouve à tous les niveaux d'organisation du monde vivant, du gène à la biosphère.
Alain Pavé nous montre comment ces mécanismes internes, véritables roulettes biologiques et écologiques, de nature déterministe, fonctionnent dans des domaines chaotiques en produisant des résultats de type aléatoire. Face à un environnement changeant, imprévisible et souvent agressif, ils engendrent la diversité qui permet aux organismes, aux populations ou aux écosystèmes de subsister, de s'adapter et d'évoluer. Ces mécanismes sont aussi des produits de l'évolution. C'est à ce prix que la vie a pu se maintenir sur notre planète : le hasard n'est pas subi, il est tout simplement nécessaire à la vie. Penser la biodiversité, à toutes les échelles et à tous les niveaux, permet une lecture intégrée du vivant. Pour mieux la comprendre et modéliser sa dynamique, il nous faut récolter des données quantitatives tant au laboratoire que sur le terrain. La nécessité du hasard cherche à évaluer le champ de nos connaissances sur la biodiversité et son évolution, ainsi que les limites de l'action de l'Homme face à ces dynamiques spontanées, qui lui échappent le plus souvent. Ce livre est aussi un appel urgent à prendre en compte l'impérieuse nécessité de l'évaluation et de l'analyse de la biodiversité pour mieux la gérer.
Alain Pavé et Gaëlle Fornet Amazonie, une aventure scientifique et humaine L'Amazonie est une région mythique. Tout un imaginaire originel s'y rattache : forêt vierge, nature maximale, terre nourricière, harmonie de cette nature et des peuples premiers qui y vivent et qui en vivent.
Mais l'Amazonie, c'est aussi et surtout une réalité : de vastes écosystèmes intertropicaux où vivent des populations humaines à l'heure de la mondialisation et des grands défis écologiques partagés par l'humanité toute entière.
Véritable laboratoire à ciel ouvert, l'Amazonie est le meilleur endroit pour étudier la biodiversité des systèmes tropicaux, leur diversité humaine et sociale et pour imaginer des modes de développement originaux, éthiques et éco-responsables. D'où la décision du CNRS d'y implanter le projet Guyane, dédié à la biodiversité et au développement durable.
Une grande aventure à l'échelle d'un territoire de recherche de 750 millions d'hectares : c'est l'aventure de ce projet que ce livre raconte...
Professeur des universités, Alain Pavé est chargé de mission auprès du directeur général du CNRS - région amazonienne.
Océanographe, Gaëlle Fornet a participé à l'installation du bureau permanent du CNRS en Guyane.
L'écologie est d'abord une science de la vie. Or, la vie des sciences l'a globalisée pour en faire la science de l'environnement. Elle est devenue une science englobante qui attire d'autres disciplines et conduit vers une nouvelle utopie : inclure les sociétés humaines dans des natures plus ou moins idéalisées. Or cet objectif relève en partie du fixisme, selon lequel la nature se maintiendrait au mieux à l'équilibre. Pourtant tout y bouge en permanence. En outre, elle serait bonne par essence ce qui, en fait, n'a guère de sens. Ayons la volonté de passer d'une vision contemplative à une représentation dynamique : elle permet une meilleure compréhension des choses et donc des actions qui amélioreraient l'état actuel de nos environnements au bénéfice des générations futures. De nombreuses solutions existent déjà et d'autres sont tracées. Elles peuvent d'ailleurs être combinées afin d'améliorer les conditions de vie des humains, donnant ainsi corps à l'utopie initiale. Notre avenir n'est pas aussi sombre que celui décrit par les tenants des passions tristes !