Charlotte Perriand (Paris, 1903-1999) est une architecte et designer française.
« Créer un équipement aussi subtil, complexe et sensible que le corps de l'homme, réaliser non seulement les données matérielles, mais créer les conditions de l'équilibre humain et de la libération de l'esprit. Voilà notre tâche. » Charlotte Perriand, Des arts appliqués à la vie quotidienne, catalogue de la Triennale de Milan, 1951
Charlotte Perriand fait partie de ces créateurs qui ont marqué le XXe siècle.
Luttant farouchement dès 1927 contre les Arts décoratifs, elle a été avec Le Corbusier le précurseur de l'architecture d'intérieur. Nous lui devons une nouvelle approche de l'art d'habiter, ouverte, faite de jeux et de flexibilité, toujours en rapport harmonieux avec l'homme et son milieu. Liée aux mouvements d'avant-garde des années 1930, à Fernand Léger et à Jean Prouvé, mais surtout célèbre pour sa collaboration avec Le Corbusier et Pierre Jeanneret, elle a signé avec eux une série de meubles révolutionnaires qui sont devenus de grands classiques.
Animée par une insatiable curiosité,elle a voyagé à travers d'autres cultures (Japon, Indochine, Brésil) qui ont influencé son oeuvre, notamment le très zen " Espace Thé " de l'Unesco (1993). Dans cette autobiographie, elle nous fait partager le destin d'une femme hors du commun qui a toujours su concilier une extraordinaire exigence de rigueur avec un amour de la vie, de la nature et de la liberté.
Cette exposition dediée à Charlotte Perriand (Paris, 1903- 1999) s'intéresse tout particulièrement à l'impact de la découverte des richesses culturelles et économiques de l'archipel nippon, par une créatrice innovante dans le domaine du design des avant-gardes du XXème siècle. Sa mission au Japon à partir de 1940 ainsi que les liens qui perdurèrent jusqu'à la commande de la "Maison de Thé" (Dialogues des cultures- Unesco,1993) ont été à l'origine de propositions inédites.
Il s'agit de saisir les composantes d'une oeuvre ouverte, profondément humaniste. Son aptitude à s'ouvrir à toutes les formes d'expression, sa soif de découverte des spécificités de la civilisation japonaise, son respect des traditions se retrouveront dans la présentation de ses photographies effectuées lors de son périple mais aussi dans son intérêt pour les traditions artisanales populaires japonaises et le mouvement Mingei. Ce "courant lié aux artisans et maîtres remarquables" dans le domaine de la poterie, du textile, du bois est encore trop peu connu en France.
L'évocation de sa première exposition "Tradition Sélection- Création" soit "Dento-Sozo-Sentaku" précédera la reconstitution de "Proposition pour une synthèse des arts" organisée à Tokyo pour faire le point sur ses "recherches sur l'art d'habiter, une synthèse des arts, en associant à l'équipement des arts plastiques incarnés par des peintures et sculptures céramiques de Fernand Léger, des peintures et des tapisseries de Le Corbusier".
Seront également présentées ses créations personnelles et ses collaborations d'après-guerre avec Prouvé, Steph Simon... Le public découvrira qu'elle a instillé un regard neuf qui influence encore bien des productions des designers actuels.
Surtout connue pour ses travaux en architecture, en urbanisme et en design de mobilier, Charlotte Perriand a pourtant développé, au cours de son oeuvre, une « parenthèse photographique » durant l'entre-deux-guerres. Pratiquée à titre personnel et dans le cadre de ses recherches, la photographie de Charlotte Perriand s'avère prolixe : clichés documentaires, photos brutes, photomontages militants ancrés dans les luttes politiques et sociales de son époque.
Aborder son oeuvre du point de vue de la photographie revisite l'histoire du médium en soi : Charlotte Perriand est de ces « non-photographes » qui annoncent l'avènement de l'image comme langage hégémonique et transversal de communication. Pionnière de la modernité, la photographie est pour Charlotte Perriand une machine à créer, à communiquer, économique, rapide, capable de traduire le regard de « l'homme nouveau », d'appréhender le monde et de l'exprimer ; pour elle, c'est une machine à révéler, à noter et à émouvoir.
Cet ouvrage et l'exposition éponyme ont vocation à montrer comment, autant que la règle ou le crayon, la photographie a été l'outil de prédilection de Charlotte Perriand dès les années 1920.