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Prix Goncourt des lycéens 2021, Prix Femina 2021, Prix Landerneau 2021 C'est l'histoire d'un enfant aux yeux noirs qui flottent, et s'échappent dans le vague, un enfant toujours allongé, aux joues douces et rebondies, aux jambes translucides et veinées de bleu, au filet de voix haut, aux pieds recourbés et au palais creux, un bébé éternel, un enfant inadapté qui trace une frontière invisible entre sa famille et les autres. C'est l'histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante et des montagnes protectrices ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l'aîné qui fusionne avec l'enfant, qui, joue contre joue, attentionné et presque siamois, s'y attache, s'y abandonne et s'y perd. Celle de la cadette, en qui s'implante le dégoût et la colère, le rejet de l'enfant qui aspire la joie de ses parents et l'énergie de l'aîné. Celle du petit dernier qui vit dans l'ombre des fantômes familiaux tout en portant la renaissance d'un présent hors de la mémoire.Comme dans un conte, les pierres de la cour témoignent. Comme dans les contes, la force vient des enfants, de l'amour fou de l'aîné qui protège, de la cadette révoltée qui rejettera le chagrin pour sauver la famille à la dérive. Du dernier qui saura réconcilier les histoires.La naissance d'un enfant handicapé racontée par sa fratrie.Un livre magnifique et lumineux.
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« Sa robe caresse le sol. À cet instant, nous sommes comme les pierres des voûtes, immobiles et sans souffle. Mais ce qui raidit mes frères, ce n'est pas l'indifférence, car ils sont habitués à ne pas être regardés ; ni non plus la solennité de l'entretien tout ce qui touche à Aliénor est solennel. Non, ce qui nous fige, à cet instant-là, c'est sa voix. Car c'est d'une voix douce, pleine de menaces, que ma mère ordonne d'aller renverser notre père. » Aliénor d'Aquitaine racontée par son fils Richard Coeur de Lion.
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Juette est née en 1158 à Huy, une petite ville de l'actuelle Belgique. C'est à travers un texte de Georges Duby (Dames du XIIè siècle, Gallimard), où Juette se trouve entre Aliénor d'Aquitaine et Iseut, que l'auteur rencontre cette figure singulière : enfant solitaire dans la demeure de ses riches parents créanciers de l'évêque, pucelle mariée malgré elle à treize ans, veuve à dix-huit, elle refuse toutes les autorités de son temps. Pour éviter un remariage, Juette entre dans l'ordre des veuves, regroupe quelques irréductibles, se retranche dans une léproserie, et finit sa vie en béguine silencieuse pendant 37 années de réclusion volontaire. Mélange de bravoure et d'insoumission, de tourment moral et d'hystérie du corps, Juette est une sainte laïque. Elle a des visions, le diable lui apparaît, la Vierge en dame blanche fait reculer les prétendants au mariage. Si l'on pouvait parler avant l'heure de féminisme, on dirait que la quête de Juette est aussi une guerre des sexes, une guerre contre le pouvoir de l'Eglise, alors que montent en Flandre, en Champagne, en Rhénanie, les premières clameurs des hérésies cathares. Juette meurt en 1228, respectée, en quasi sainte. Clara Dupont-Monod en fait ici une figure de roman, tour à tour passionnée, véhémente, amoureuse sans autre objet qu'un prêtre de l'Abbaye de Floreffe, Hughes, son confident, son seul ami. Roman à deux voix, ce livre de grand talent nous fait découvrir de l'intérieur le Moyen Age des mystiques et des guerriers.
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" Je m'appelle Marc, je suis roi de Cornouailles et ma femme me trompe. Elle s'appelle Yseut. Derrière son silence, je l'entends ordonner le saccage de ma vie. "Le roi Marc : l'oublié du roman fondateur de l'amour en Occident, le mari trompé, roi de misère, qui ne peut qu'assister impuissant à la passion sublime entre Yseut, sa femme, et Tristan, son neveu. Ne méritait-il pas, pour la première fois, de prendre la parole et de dire sa tristesse, sa rage, son amour à lui ?Monologue à en perdre le souffle, errance d'un roi seul dans les odeurs d'air salé et de bois brûlé, cavalcades au bord des falaises de Tintagel, choc des armes, folie des mots. Ce monarque médiéval est un homme d'aujourd'hui.Avec un lyrisme qui emprunte à la légende toute sa force, Clara Dupont-Monod dit l'amour furieux et doux d'un homme pour Yseut l'infidèle, « au corps de vent, de catin, d'enfant malade ».Clara Dupont-Monod est née à Paris en 1973. Elle est l'auteur chez Grasset d'un premier roman, Eova Luciole.
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" Pendant six mois, à raison de trois fois par semaine, j'ai installé en face de moi une jeune prostituée bulgare. Je voulais tout savoir, à commencer par ce que ma raison, et à fortiori, la nôtre, notre raison collective, refuse d'entendre : cette forme de prostitution relève de la dégringolade humaine. Or, ce regard humain fait défaut. On s'y dérobe. En France, la prostitution a toujours bénéficié d'un double regard : il est informatif, journalistique. Ou bien il est humanitaire, teinté de morale - cette morale qui sert d'arcane au débat d'aujourd'hui, une morale drapée de " dignité humaine ". En filigrane, on distingue deux postulats : les prostituées ne sont que victimes ; la prostitution ne saurait être abordée autrement que sous l'angle de phénomène exclusivement collectif - pour preuve, personne, à ce jour, dans le cadre du débat sur l'abolition de la prostitution, n'a donné la parole à ces filles.
Une jeune prostituée de 21 ans a pu ici prendre la parole. Comment surmonter le dégoût ? comment tomber amoureuse ? Comment survivre ? Et : pourquoi ? Que se passe-t-il dans la tête d'une fille jetée sur le trottoir, en prise avec une telle violence ? Peut-elle encore être sauvée ? C'est cette approche humaine que j'ai essayé d'adopter avec elle. Alors la prostitution paraît si proche de nous. Détresse inoffensive - on passe devant ces filles, de plus en plus présentes au coeur des villes - elle est le miroir inversé de notre société. Jour après jour, tandis que se nouait, entre cette jeune fille et moi, un lien affectueux, tandis que son histoire mettait à mal mes certitudes, j'ai vu se dessiner un monde d'une effrayante cohérence, et surtout la démission des pouvoirs publics, des politiques, ceux-là même qui prétendent agir au nom de la " dignité humaine ". Rencontrer Iliana m'a permis de comprendre les étapes d'une déchéance, puis ceux d'un système, et enfin ceux, plus obscurs, d'une bienheureuse rencontre entre deux mondes. ". -
Depuis le XIIe siècle, Aliénor d'Aquitaine a sa légende. On l'a décrite libre, sorcière, conquérante : « le roi disait que j'étais diable », selon la formule de l'évêque de Tournai...
Clara Dupont-Monod reprend cette figure mythique et invente ses premières années comme reine de France, aux côtés de Louis VII.
Leurs voix alternent pour dessiner le portrait poignant d'une Aliénor ambitieuse, fragile, et le roman d'un amour impossible.
Des noces royales à la seconde croisade, du chant des troubadours au fracas des armes, émerge un Moyen Age lumineux, qui prépare sa mue.
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Nestor rend les armes
Clara Dupont-Monod
- Sabine Wespieser
- Litterature Etrangere
- 25 Août 2011
- 9782848051000
NESTOR REND LES ARMES. Avec ce court roman en forme d'allégorie, Clara Dupont-Monod confirme l'inscription de son travail littéraire dans la veine des portraits d'exclus et de marginaux.
Nestor est comme exilé dans son propre corps. Il est obèse. Le monde extérieur lui est hostile, les moindres gestes du quotidien sont pour lui une souffrance : depuis longtemps déjà, Nestor ne parvient plus à nouer ses lacets, descendre un escalier est une épreuve et parcourir les cent mètres qui le séparent du supermarché une expédition. Enfermé dans sa solitude, son existence apparaît comme une succession d'instants et de mouvements détachés les uns des autres : " Il se laissait glisser, conscient qu'à n'avoir aucune raison de vivre, on n'en a pas non plus pour mourir. Il flottait. Parfois il se disait que les émotions ne pouvaient plus atteindre son coeur à cause des barrages de graisse à franchir. Alors, pensait-il, il valait mieux ne pas maigrir. Il serait terrassé par une rafale d'émotions enfouies dans ses plis. Il était une boîte fermée. " De cet être désigné au regard des autres comme un monstre, Clara Dupont-Monod tente de saisir le mystère. Celui dont le seul horizon est la photo d'un phare du bout du monde accrochée dans sa cuisine devient sous nos yeux un personnage, riche de l'histoire de son exil : argentin, arrivé en France pendant la dictature, il y retrouve une jeune femme qu'il épouse et avec qui la vie est douce. Jusqu'au drame qui inexorablement les éloigne l'un de l'autre au point qu'il finira enfermé dans la rassurante forteresse de sa propre chair.
Au fil des pages, et comme à l'insu du lecteur, l'obèse réduit à sa particularité physique prend la dimension d'un être humain ordinaire. Contraint de trier les papiers de sa femme, il se retrouve confronté, à travers lettres et journaux intimes, à la vérité qu'il fuyait. Une brèche s'entrouvre alors dans le système de défense de celui à qui seule la nourriture apporte du réconfort - ses repas sont orchestrés comme des campagnes militaires et ingurgités dans sa cuisine, devenue son refuge.
À force de patience et de tendresse, une jeune femme, médecin, parviendra peut-être à conjuguer sa propre solitude à celle de ce patient peu ordinaire. La langue poétique et précise de Clara Dupont-Monod agit comme un charme puissant pour suggérer l'indéfinissable attachement, tissé de leur besoin de chaleur et de leur détresse, qui naît entre ces deux-là...
L'écrivain se garde bien de conclure : trois issues s'offrent au lecteur, comme s'il était impossible qu'une si belle histoire finisse mal.
Clara Dupont-Monod est née en 1973. Diplômée en ancien français, elle a commencé très tôt une carrière de journaliste. Après avoir dirigé les pages culture de Marianne, elle est aujourd'hui responsable de la culture pour La Matinale de Canal + et intervient régulièrement dans l'émission Jeux d'épreuves (France Culture). Dès son premier livre, Eova Luciole, paru en 1998 chez Grasset, elle a mis en scène des figures de la marge. Son dernier roman paru, La Passion selon Juette (Grasset, 2007), portrait d'une femme qui au XIIe siècle entra en rébellion contre l'ordre établi, a remporté le prix Laurent Bonelli et a été finaliste du prix Goncourt. Elle est mère de deux enfants et vit à Paris.
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L'histoire se passe sur une île au large du Venezuela, au début du siècle. Théodora Lucile Palombio, une jeune femme très belle, a été abandonnée par son premier mari puis laissée veuve par un deuxième. Elle est la mère d'une petite fille étrange, Eova Luciole. Un jour, elle découvre que deux ailes ont poussé dans le dos de sa fille. Affolée, Théodora appelle au secours et Octavio Monsarez, amoureux de Théodora, vient constater ce prodige. Eova Luciole a donc des ailes mais ne semble pas s'en soucier. Son premier vol l'enchante. Sa mère, en revanche, est désespérée. Octavio, lui, s'en amuse. Tout change lorsque, un soir de tempête, Théodora et Octavio retrouvent Eova dans un arbre, les ailes brisées. De ce jour, Octavio et Théodora ne s'entendent plus. Une pluie incessante se met à tomber, et dans le village tout se dégrade, les femmes s'épient, les hommes boivent, les enfants se font battre. Un jour, le fleuve vient s'abattre sur les maisons, entraînant la mort du maire. A son enterrement, Théodora et sa fille sont agressées par la population. Terrorisée, Eova s'envole. Elle est envoyée en pension. Elle y rencontre Paco Aracas, un adolescent qui tombe amoureux d'elle. Mais Eova est très malheureuse au pensionnat. Elle finit par retourner chez elle et se fiance avec Arturo, son ami d'enfance....