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Eric Chevillard
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«Chiens écrasés» est l'appellation humoristique donnée à la rubrique des journaux consacrée aux faits-divers anodins. Dans ses célèbres Nouvelles en trois lignes écrites en 1906 pour le journal Le Matin, Félix Fénéon avait transformé ce degré zéro du journalisme en littérature de haute volée. Eric Chevillard reprend le flambeau: prenant l'expression chiens écrasés au pied de la lettre, il assassine, à chaque page, un clébard innocent. Maniant l'art de l'ellipse avec délice et cruauté, Chevillard livre un exercice de style affreusement drôle, à lire et relire à tous les âges! Le livre est illustré de onze gravures de J.J Grandville tirées des Scènes de la vie privée des animaux (1842), et la mise en page très soignée comporte quelques calligrammes et autres jeux typographiques.
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Si Ronce-Rose prend soin de cadenasser son carnet secret, ce n'est évidemment pas pour étaler au dos tout ce qu'il contient. D'après ce que nous croyons savoir, elle y raconte sa vie heureuse avec Mâchefer jusqu'au jour où, suite à des circonstances impliquant un voisin unijambiste, une sorcière, quatre mésanges et un poisson d'or, ce récit devient le journal d'une quête éperdue.
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« Il m'a été confié et j'ai accepté de le garder en observation. On aura estimé à juste titre que j'étais le seul qualifié pour mener à bien cette étude. Il est maintenant là, devant moi, étrangement mobile, brûlant d'on ne sait quelle ardeur. Curieux sujet, décidément. Je vais prendre bien soin de lui. ».
É.C. -
L'autofictif sans égards pour le lecteur sensible
Eric Chevillard
- L'Arbre Vengeur
- 5 Janvier 2024
- 9782379412349
"Lisse et sans saveur, se dit le sensitivity reader en caressant une tomate avec un plaisir évident et déjà même un début d'érection, les maraîchers ont dix ans d'avance sur les écrivains ! Mais la littérature parviendra bientôt à une telle perfection, on peut compter sur moi..." Et quand je n'écris pas, ce sensitivity reader juge avec une grande sévérité mon silence qui serait, je le cite, une véritable insulte faite à tous les malheureux réellement affligés de mutisme.
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Le Vaillant petit tailleur
Eric Chevillard
- Éditions du Minuit
- Minuit Double
- 20 Janvier 2011
- 9782707321510
On se croyait quitte de ces sornettes, pour parler franc. L'enfance est derrière nous. Et le conte du vaillant petit tueur de mouches est une vieille histoire. Or voici qu'un écrivain prétend soudain devenir l'auteur conscient et responsable qui fait défaut à celle-ci, enfantée négligemment par l'imagination populaire, soumise à tous les avatars de la tradition orale puis recueillie en ce lamentable état par les frères Grimm au début du XIXe siècle. Il a des ambitions. Il compte bien élever le frêle personnage qui en est le héros au rang de figure mythique. Noble projet, mais quel est-il, ce héros, le vaillant petit tailleur ou l'écrivain lui-même ? Dans un monde fabuleux, peuplé de géants et de licornes, cette dernière hypothèse pourrait être moins extravagante qu'il n'y paraît.
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Nous sommes le 5 novembre 2019 et je m'apprête à passer la nuit seul dans la Grande Galerie de l'Évolution du Muséum d'Histoire naturelle de Paris.
Cette perspective est-elle si effrayante ? Je n'ai pas l'intention de laisser ma peau aux taxidermistes du muséum ! Ils ont assez à faire avec l'éléphant de mer. Je suis sans doute le seul de la bande au contraire qui ne risque rien dans les heures à venir. Sont réunies ici les conditions de la plus parfaite sérénité. Ces toisons soyeuses, ces pelages, ces peluches... n'est-ce pas ce qui depuis toujours rassure l'enfant craintif dans le grand vide noir de la nuit ?
Cette nuit dans la grande galerie, Éric Chevillard la passera plus précisément dans la salle des espèces disparues et menacées. Et si triste est le constat du regroupement de ces deux populations, le lieu, effrayant, exotique, fantasmagorique est plus que propice à l'écriture.
De déambulations en contemplations, l'auteur en vient à s'imaginer sauveur de ces mondes perdus. S'ensuivent des pages sublimes et virevoltantes dans lesquelles il tente de faire revenir à la vie des animaux disparus, notamment un oeuf de vorompatra,, grand émeu volatilisé depuis trois siècles, uniquement par la force d'invocation d'un poème. Car « Pour ressusciter les espèces éteintes, mieux que l'incertain clonage cellulaire, ne serait-il pas judicieux de s'en remettre à la poésie ? ».
Emporté par l'incroyable élan de ce livre, le lecteur ne pourra que tomber d'accord.
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Son visage exprime une ferme résolution. Ses gestes sont brefs et précis. Sa main ne tremble pas. Il joue pourtant sa vie dans cette affaire. Il est écrivain et, ce soir, il se propose d'écrire son autobiographie. Sur sa table se trouve rassemblé tout le matériel nécessaire, du papier, un crayon, une gomme, un hérisson. Qui n'a rien à faire là, ce dernier, vous avez raison. Dont la présence incongrue est même un vrai mystère. Mais l'effet de surprise s'estompe vite. Place à la colère. Ce hérisson naïf et globuleux est une calamité. Si doué soit-il lui-même pour l'introspection vicieuse et le repli sur soi compulsif, il contrarie grandement et déroute l'ambitieux projet autobiographique de l'écrivain. D'où sort-il, ce nuisible animal, renifleur bruyant, hirsute, insaisissable, que cherche-t-il ici ? Que me veut-il ?
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Cet écrivain aime sa chambre, sa table, sa chaise, dans la pénombre : on l'envoie en Afrique où sont les lions, dans le soleil. Que va-t-il chercher là-bas ? Un grand poème, dit-il. Ou ne serait-ce pas plutôt l'inévitable récit de voyage que tant d'autres avant lui ont rapporté ? On l'a lu déjà, et relu. L'auteur va prétendre que des indigènes l'ont sacré roi de leur village. Il aura percé à jour les secrets des marabouts et appris de la bouche d'un griot vieux comme les pierres quelque interminable légende avec métamorphoses. Le pire est à craindre. Par bonheur, l'aventure tourne court. L'hippopotame se cache. L'Afrique curieusement ne semble guère fascinée par le courageux voyageur. En revanche, celui-ci prend des couleurs : est-ce le soleil ou la honte ? Nous l'appellerons Oreille rouge.
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Demandez à Ski ce qu'on disait l'autre jour chez Chevillard, à deux pas de nous, quand vous êtes entré dans ma loge. (Proust, La Prisonnière) On oublie un peu que Chevillard avait trouvé sa place dans la Recherche de Proust. Il n'était que temps de voir l'auteur de L'Autofictif rendre la monnaie de sa pièce au grand écrivain dont on célèbre un centenaire en 2023.
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La Nébuleuse du crabe
Eric Chevillard
- Éditions du Minuit
- Minuit Double
- 7 Septembre 2006
- 9782707319685
La première fois que Crab fut pris pour un éléphant, il se contenta de hausser les épaules et passa son chemin. La deuxième fois que Crab fut pris pour un éléphant, il laissa échapper un geste de mauvaise humeur. La troisième fois, enfin, devinant que ses ennemis avaient comploté de le rendre fou, il ceintura vivement l'insolent et l'envoya valser à dix-huit mètres de là... Tel est Crab, dont ce livre voudrait rapporter quelques gestes remarquables et que l'on verra ainsi avec un peu de chance plier le ciel comme un drap ou se tuer par inadvertance en croyant poignarder son jumeau, puis devenir torrent pour mieux suivre sa pente. À moins évidemment qu'il ne se terre plutôt tout du long dans son antre obscur, s'agissant de Crab, on ne peut rien promettre.
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Monotobio plutôt que Mon autobio, avec quatre O comme quatre roues bien rondes, car il s'agit de ne pas traîner. Nul temps mort dans nos vies, le train des conséquences ne ralentit jamais, tout s'enchaîne selon la logique impérieuse du destin. Nous rencontrons ici un écrivain éperdu, aux prises avec son autobiographie. Peut-il se permettre de passer sous silence les plus menus incidents de son existence ? Chaque instant compte. La seconde où il a marché sur sa balle de ping-pong, celle où il a caressé un zèbre ... S'il tait ces épisodes, la trame de son récit ne risque-t-elle pas de se défaire ? Et si tout était écrit avant d'être vécu, que lui reste-t-il maintenant à inventer ?
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Les absences du capitaine Cook
Eric Chevillard
- Éditions du Minuit
- Minuit Double
- 5 Mars 2015
- 9782707328663
De James Cook, dont le navire The Adventure quitta Plymouth pour les mers australes le 13 juillet 1772, qui découvrit la Nouvelle-Zélande et Tahiti, navigateur infatigable et digne de Napoléon pour l'esprit de conquête, affichant d"ailleurs le même petit air fat et borné, il ne sera pour ainsi dire pas question dans ce livre, comme son titre très honnêtement nous en avertit. C'est jouer franc jeu. En revanche, comme partout où le capitaine Cook n'osa s'aventurer par crainte de trop grands périls, on y rencontrera notre homme, curieux personnage, comme chez lui dans ces contrées où tout peut arriver : deux femmes naître attachées par les cheveux et traverser l'existence ainsi sans se soucier l'une de l'autre, un vieux préhistorien perdre la mémoire de tous les événements postérieurs au paléolithique, ou encore un ermite distrait périr par noyade dans les sables du désert.
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Certes, à première vue, tout laisse à penser que palafox est un poussin, un simple poussin puisque son oeuf vole en éclats, un autruchon comme il en éclôt chaque jour de par le monde, haut sur pattes et le cou démesuré, un girafon très ordinaire, au pelage jaune tacheté de brun, un de ces léopards silencieux et redoutables, volontiers mangeurs d'hommes, un requin bleu comme tous les requins bleus, assoiffé de sang, en somme un moustique agaçant de plus, avec sa trompe si caractéristique, un éléphanteau banal, mais bientôt on se prend à en douter.
Palafox coasse. palafox nous lèche le visage et les mains. alors nos certitudes vacillent. penchons-nous sur palafox. e.c.
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Les tortues de Floride élevées en aquarium ne sont pas tout à fait des cailloux. Elles ont donc besoin d'eau et de nourriture pour vivre. C'est ce que découvre le narrateur de cette histoire, de retour chez lui après un mois d'absence. Il croyait la sienne plus endurante, mais la carapace décalcifiée de la petite Phoebe se fend sous son pouce. Par ailleurs, alors qu'il s'employait à réhabiliter en la signant de son nom l'oeuvre de Louis-Constantin Novat, écrivain ignoré du XIXe siècle, cette généreuse initiative se trouve soudain menacée. Or la forêt des mystères n'abrite pas que des crimes : les deux mésaventures pourraient bien être liées.
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LUI - Et donc, mesdames messieurs, les lettres que vous voyez assemblées sur cet écriteau forment le mot tapirs. Contrairement aux lettres T.A.M.A.N.O.I.R.S. qui, malgré un bon début et même un excellent départ, échouent dans leur tentative. Leur effort n'est pas absolument vain cependant et les trois dernières comme les deux premières ne détonneraient pas dans le mot tapirs, c'est vrai, elles ne dépareraient pas le mot tapirs. Mais entre celles-ci et celles-là, hélas, il s'en trouve quatre autres, observez bien, le M, le A, le N et le O qui sont tout à fait déplacées, tout à fait hors de propos pour ne pas dire saugrenues, qui infléchissent considérablement le sens, qui le faussent, avouons-le, si bien que le mot formé finalement désigne tout autre chose que nous, nomme une autre réalité, une autre bête, car enfin, combien de fois faudra-t-il vous le dire...
ENSEMBLE - Nous ne sommes pas des tamanoirs !
LUI - Nom de Dieu !
Crabes, punaises, hérissons, orang-outans ou, plus récemment, tortues, l'animal fait partie de la panoplie littéraire d'Eric Chevillard. Indiscrète plongée au coeur du zoo, ces dix-huit dialogues d'animaux, qui agissent à la fois comme loupe et miroir, révèlent autant qu'il auscultent : nous voici scrutés par un verbe vicieux...
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Voici venue l'heure du verdict, l'heure des révélations. Albert Moindre est mort et il découvre l'au-delà, ce qu'il en est, ce qui s'y passe. Sommes-nous vengés ? Sommes-nous punis ? À quoi ressemble le Royaume des cieux ? Ce témoignage de première main apporte des réponses à nombre de nos interrogations anciennes. On le lira si ces questions nous tourmentent, pour être fixés une bonne fois.
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Un jour, Gaston Chaissac a saisi un pinceau. Pour certains il était seulement un homme marginal, mais pour d'autres il était un artiste. Il a été reconnu après sa mort.
Personne ne l'avait compris.
Un jour Chevillard qui avait commencé à écrire a vu les peintures de Chaissac. Il lui a donné une voix. Il l'a fait vivre. Il en a fait un livre.
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Mourir m'enrhume
Eric Chevillard
- Éditions du Minuit
- Roman Francais Minuit
- 1 Octobre 1987
- 9782707311412
Monsieur Théo était né pour mourir comme d'autres naissent pour danser ou pêcher la baleine. L'heure a sonné, enfin, après quatre-vingts ans, où il va pouvoir donner sa mesure. Chassé de son domicile, il trouve refuge chez Suzie Plock, veuve de son vieil ami Martial Plock, un imbécile. Là, il reçoit parfois la visite de Lise, petite complice délicate de son agonie, qui confond céleri et salsifis comme tout le monde.
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On reconnaît le chevet de l'honnête homme à la présence discrète du dernier Autofictif. Pour peu qu'il les garde tous, l'équilibre est risqué et laisse entrevoir une possible chute. Car nous en sommes désormais à quatorze volumes, de quoi entrer dans les annales de la littérature française. L'avantage, c'est qu'on peut le prendre en cours de route, et sans permis. Bref, enfin démasqué, L'Autofictif nu sous son masque s'annonce comme le plus torride de la série, celui qui en dévoile plus que tous les autres, celui qu'il ne faut pas manquer sous peine de passer à côté d'un univers littéraire en expansion mais unique en son genre.
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L'homme qui nous livre ici son témoignage porte en permanence et très naturellement une chaise retournée sur la tête, ce qui lui vaut depuis toujours bien des déboires et des railleries, mais aussi, tout à coup, l'enviable privilège de plaire à Méline. Celle-ci l'invite même à s'installer chez elle avec ses vieux amis. Cependant, l'envahissante présence des parents de la jeune fille les oblige à se transporter au plafond, où les conditions de vie se révèlent d'ailleurs excellentes et en tout point meilleures qu'au sol. On se demande alors pourquoi Méline hésite à les rejoindre là-haut.
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Pour quelques damnés heureux ou malheureux, la littérature décide de tout. Chaque chose sera vue à travers son prisme et rien ne sera vraiment vécu avant d'être formulé. Ce livre est-il un récit humoristique délirant, une confession autobiographique désarmante, un essai polémique agressif, ou bien plutôt, outrepassant ces catégories qui se télescopent ici, tantôt joyeusement, tantôt brutalement, une mise à l'épreuve de la vie de l'auteur dans le champ de la littérature où il s'est établi au saut du berceau ? Nous y lirons donc un roman bien dans sa manière (un peu trop sans doute), et même deux romans puisqu'un second (l'histoire d'un homme qui suit une fourmi) vient soudain interrompre le premier. Mais nous y lirons aussi les interventions et commentaires de l'auteur, soucieux de garder la main sur sa création et d'élucider ce qui se trame peut-être à son insu dans ses fictions.
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Oui mais moine en Caraïbe vous vous y voyez vous moine en Caraïbe, barbe et bure sous le soleil fixe au bord du lagon interdit, barbe et bure et tous ces fruits défendus, trop charnus, sur tout le corps bure et barbe sur le visage, oh évidemment vu comme ça mais pendant ce temps-là quoi de l'iguane en chartreuse ?
Qu'en serait-il des moines s'ils vivaient aux Caraïbes et des iguanes en Chartreuse ? Pourquoi les boeufs n'auraient-ils pas que trois pattes ? La mer cesse-t-elle d'ourler sur la sable une fois qu'on lui tourne le dos ? Autant de questions absurdes nées d'une imagination vicieusement fertile qu'explore Éric Chevillard dans une prose volubile.
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Puis il inventa l'écriture. Dès lors, impossible de reculer : l'homme entra dans l'Histoire. Mais il serait faux de croire que tout a commencé pour lui ce matin-là. Depuis longtemps, l'homme s'activait sur la Terre. Moins doué pour la vie de tous les jours que les animaux, ses voisins, bisons, chevaux, mammouths, dont la paisible assurance et le sens pratique l'impressionnaient fortement, il en fit les héros de ses fresques rupestres ? grandes figures éternelles, déjà vieilles de vingt ou trente mille ans, que l'on ne saurait donc comparer sans sourire à nos récentes peintures sur toile, démodées avant d'être sèches.
La grotte de Pales s'ouvre ainsi sur un réseau de galeries richement ornées. On la visite. Le narrateur de cette histoire, quand elle commence, vient justement d'être nommé au poste vacant de guide et gardien du site. Il tarde pourtant à prendre ses fonctions. Quelque chose le retient.
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L'île de Choir est un écueil de terre rude, hostile, inclément, et nous, ses habitants infortunés, de toutes nos forces nous le haïssons, nous le honnis-sons, nous le maudissons. Tous, nous rêvons de par-tir. Impitoyablement, nous sommes retenus par ses sables et ses boues. Il se raconte pourtant qu'un ancêtre, Ilinuk, né avec une difformité formidable, parvint à s'en arracher pour rejoindre le ciel. Un de ses anciens compagnons vieux comme l'orage et la cendre endort nos douleurs et calme nos plaintes avec le récit de sa vie prodigieuse. Ilinuk a promis de revenir nous chercher. Nous vivons depuis pour cette seule espérance. Et nous guettons son retour, ne cessant de scruter le ciel que pour haïr, honnir et maudire le sol de Choir.