Albert Einstein (1879-1955), c'est une façon d'être, de penser et de créer sans pareil. Il a mené avec une ardeur et une obstination tranquilles son enquête sur l'Univers, et permis de fonder une véritable cosmologie scientifique. Dans cet ouvrage inclassable - ni livre de vulgarisation ni biographie -, Étienne Klein nous invite à faire quelques pas en compagnie de ce géant de la physique, à la trajectoire atypique, cet humaniste conscient des dangers et des bouleversements qui menacent l'Europe à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Ouvrage personnel qui juxtapose, à la manière d'un portrait cubiste, différents points de vue, entrecroise fragments de vie et découvertes scientifiques, et tente de mettre au jour la façon si singulière dont Einstein posait les problèmes.
Dans la veine des «Tactiques de Chronos» (2004), essai consacré au temps, l'auteur interrogera la notion de vide sous toutes ses formes : philosophiques, scientifiques, culturelles, symboliques, langagières, et même sportives (avec l'alpinisme). En nous racontant l'histoire du vide, c'est presque toute l'histoire de la physique qu'il nous relatera. Car le statut que la physique accorde au vide est toujours corrélé à celui qu'elle accorde à la matière.
Naguère souveraine, la science est aujourd'hui en question : cible de cri-tiques d'ordre philosophique ou politique, tenue pour responsable de maintes dérives du monde actuel, quand elle n'est pas victime de l'ignorance et du désintérêt.
L'illusion même d'une science unitaire, omnisciente et transcendante, de la mathesis universalis chère à Leibniz, s'est dissipée, y compris à l'intérieur d'un champ de connaissances dont aucun spécialiste ne maîtrise la totalité. Signe des temps : le beau nom de " savant " - de qui goûte la saveur du savoir - a cédé la place au sec " scientifique ", élément anonyme d'un complexe réseau. Et pourtant, la science - l'univers de techniques innovantes, d'évaluations quantitatives, d'expertises aiguës qu'elle ne cesse de créer - reste, autant que l'antique fondement religieux, le socle idéal de nos sociétés, celui qui façonne nos modes de vie et nos schémas mentaux.
Au point qu'une nouvelle métaphysique de la technoscience triomphante promet, tel le Pantagruélion rabelaisien, de tout expliquer et de tout résoudre ! Qu'est-ce que la science ? Que peut-elle ? Que vaut-elle ? Les questions de Kant restent celles que le public, spontanément, pose à une recherche aussi profondément engagée dans le devenir de nos sociétés. Comment en comprendre les origines et le développement, l'essence paradoxale, l'extrême complexité qui vire, désormais, à l'incommunicabilité et donne prise à la confusion ? Comment en apprécier les résultats tout en en mesurant les limites et les risques ? Comment éviter le relativisme désabusé ou le rejet pur et simple ? Comment sortir du flou, des approximations et des idées toutes faites ? Les réponses à ce faisceau de questions ne peuvent être que plurielles.
Et ludiques : la réflexion est un jeu de miroirs où les divers points de vue se concentrent et s'éclairent, de prismes où ils se diffractent. Aussi deux chercheurs - un biologiste et un physicien - et deux philosophes se livrent-ils au libre jeu des échanges entre les perspectives qu'ils dessinent, et des rebonds sur les questions que leur posent les représentants, non spécialistes, de la société civile.
Il en ressort toute une série d'aperçus concrets, aussi excitants pour l'esprit qu'essentiels à la compréhension de ce qui se joue : sur le boson de Higgs, les théories physiques et la prévision, par le calcul, de réalités à vérifier par l'expérimentation ; sur le traitement individuel de l'atome et l'engouement pour lus nanotechnologies ; sur le créationnisme niant l'évolution ; sur le transhumanisme promettant de remodeler l'homme...
Illustrer ainsi la grandeur de l'esprit scientifique et la conscience honnête de ses limites comme de son essentiel inachèvement en est la meilleure défense : c'est, du même coup, l'appel à une authentique culture, ouverte à la complexité, soucieuse des implications, désireuse de " l'expansion des choses infinies ".