À Anvers, alors qu'il joue enfant au foot en culottes courtes, Harry Gruyaert va chercher le ballon dans les hautes herbes qui lui caressent les cuisses. La lumière est belle, son esprit s'échappe du terrain. Le photographe décrit ce moment comme une libération des sens, comme le point de départ de sa quête de sensations.
Membre de Magnum depuis 1982, Harry Gruyaert décrit la photographie comme une expérience physique, un état d'excitation, une façon d'être présent au monde. Le monde, il le traduit en couleurs à une époque où le noir et blanc rafle la mise sur les cimaises des galeries.
Héritier de la tradition américaine, très influencé par le cinéma, Harry Gruyaert a su créer une palette chromatique extrêmement personnelle, un rouge dense, un vert qui vibre, une manière de découper la lumière et ses ombres dans le cadre. Qu'il s'agisse de la Belgique, du Maroc, des États-Unis, de Paris ou de Moscou, aucun sujet ne compte en tant que tel. Tous constituent des réservoirs d'inspiration et d'impressions rétiniennes.
Ce livre, à l'editing somptueux, est son premier livre rétrospectif.
Un futur collector?
Très attendue - les deux premières éditions (2003 et 2008) étant épuisées depuis longtemps - voici enfin une toute nouvelle édition de Rivages d'Harry Gruyaert.
Avec son nouveau format, ce Rivages est plus généreux : 40 nouveaux rivages, la plupart inédits.
Des plages de Normandie à celles d'Inde, du Maroc ou d'Égypte, Harry Gruyaert enregistre depuis près de 40 ans les subtiles vibrations chromatiques des rivages d'Orient et d'Occident. Les ciels menaçants et leurs jeux d'ombres soulignent la fulgurance de l'instant et du hasard quand la lumière inonde l'espace. Ce « moment poétique » sous-tend l'oeuvre d'Harry Gruyaert pour qui photographier permet de faire surgir les conditions d'un émerveillement.
Durant plus de trente ans Harry Gruyaert a sillonné la péninsule indienne. Pour la première fois, cet ouvrage rassemble environ 150 photographies, pour la plupart inédites, qui racontent une Inde à la fois intemporelle et moderne.
Ces images témoignent de la singularité du photographe : de son intérêt pour le récit, l'espace public et les scènes inattendues. Gruyaert dit avoir besoin de voyager pour ressentir le monde et l'exprimer en images. Du Gujarat au Kerala, il a saisi une certaine quintessence de ce pays aux multiples légendes. Rues grouillantes d'activités de New Delhi ou de Calcutta, modestes villages du Tamil Nadu ou du Rajasthan, ghats des grandes cités religieuses de Bénarès ou de Varanasi... Des femmes en sari safran et pourpre battent le grain, des teinturiers s'activent dans des cuves fumantes, un campement de bergers nomades s'organise dans la lumière crépusculaire... L'air est saturé de couleurs, de lumière, de bruits, parfois de silence aussi. « La couleur doit être primordiale », précise Gruyaert, elle restitue une perception émotive, donne une vision graphique du monde. Les atmosphères aux subtiles variations chromatiques dressent un tableau contrasté et à rebours de tout exotisme. Loin des stéréotypes, ces images donnent à voir la pluralité de l'Inde au fil des années et des événements politiques du pays. « Faire une photo, c'est à la fois chercher un contact et le refuser, être en même temps le plus là et le moins là », dit le photographe.
Il s'agit de faire surgir l'émerveillement, de saisir ce qui caractérise le lieu. La recherche de densité dans le cadre fait de la photographie une expérience physique. Expérience qui s'incarne particulièrement ici, dans ce voyage multi sensoriel en Inde.
Ce livre souligne la dimension hyper graphique de l'oeuvre d'Harry Gruyaert. L'aéroport est un concentré de son vocabulaire visuel : intensité des couleurs, géométrie des formes, transparence, jeux de lumière et reflets. Une exposition très grand format dans les aéroports d'Orly et Roissy présentera un choix de photos issues de "Last Call" sur 50 bâches 4 x 3.
Ayant pris la distance nécessaire, je suis retourné en Belgique, comme happé par cette relation amour/haine qui m'emportait.
Photographier son pays, en évitant les pièges sentimentaux ou documentaires, n'est pas si simple.
J'ai commencé à travailler en noir et blanc, trop mélancolique, pas assez réaliste et, rapidement, ce sont les couleurs qui se sont imposées, devenant évidentes.
Ce que je voulais exprimer prenait forme.
La Belgique est probablement le pays européen qui s'est le plus vite américanisé après la guerre, d'où la puissance de cette banalité, confrontée au surréalisme et à la force des traditions conservées malgré tout.
Beau, laid, banalité du beau, beauté de la laideur. Ces contradictions sont aussi les miennes.
Harry Gruyaert La réunion en un ouvrage de deux artistes belges parmi les plus justement considérés et appréciés, Hugo Claus et Harry Gruyaert ne peut générer qu'une oeuvre forte et profondément originale. Mais il faut admettre que, ni dans le propos de l'écrivain, ni dans celui du photographe, il n'y a de souci de description ou d'analyse au sens ethnologique du terme.
Deux sensibilités se rencontrent, se complètent, quelquefois se heurtent, l'incandescence de la langue rejoignant le fracas des couleurs.
Ce livre n'est pas un témoignage sur un pays dont on a souvent dit les particularités, jusqu'à cette étrangeté que les peintres ont toujours soulignée, de la grande époque flamande à Delvaux ou Ensor.
Ce livre n'est pas un constat, c'est, livré sans contrainte, un poème à deux voix qui dit l'amour-haine que deux artistes vouent au plat pays qui est le leur.
Robert Delpire.
La version anglaise de cette série de Harry Gruyaert consacrée à l'Inde. Durant plus de trente ans Harry Gruyaert a sillonné la péninsule indienne. Pour la première fois, cet ouvrage rassemble environ 150 photographies, pour la plupart inédites, qui racontent une Inde à la fois intemporelle et moderne...
Deux livres reliés sous coffret : l'un consacré aux photographies prises à Las Vegas en 1981, l'autre à celles prises à Moscou en 1989 alors que le monde était encore divisé en deux blocs étanches. Harry Gruyaert a capté les lumières de chacun de ces deux univers et révèle ici une étonnante archive : celle des couleurs de l'Histoire. Cet écrin éditorial au design impeccable est sans conteste LE livre photo à offrir cette année.
« Il m'est ainsi devenu possible d'envisager de travailler sur la Belgique, car je n'y vivais plus. Il est difficile de travailler sur l'endroit où l'on habite. On est beaucoup moins aux aguets ; on commence à trouver tout normal. Comme je faisais beaucoup d'aller-retour, je constatais que, souvent, les meilleures images étaient celles prises au début de mon séjour. On était en 1973 et je n'y travaillais qu'en noir et blanc. Tout me paraissait gris. Je suivais parfois le calendrier des innombrables fêtes locales, carnavals, processions et autres, très particuliers en Belgique et sujets à de spectaculaires débordements alcoolisés. Malgré tout, je voulais éviter les pièges sentimentaux ou documentaires. » Harry Gruyaert nous transporte dans un pays qui, malgré son américanisation rapide, reste ancré dans ses traditions, ce qui offre au spectateur de savoureux chocs visuels.
Le photographe Magnum revient dans un nouvel ouvrage consacré aux abords de l'eau, là où le paysage terrestre s'achève pour devenir maritime. La Mer morte en Israël, le fleuve Mali au Niger, la Mer du Nord en Islande, la Corée du Nord ou Biarritz, les photographies d'Harry Gruyaert, dépouillées mais aux couleurs intenses, révèlent un grand sens de la poésie et de la composition.
Son rapport très intuitif et physique aux lieux immerge le spectateur dans un univers qui emprunte à la fois au monde du cinéma et à celui de la peinture. « Une bonne photo est une photo qui dit beaucoup de choses sur le lieu et le moment où elle a été faite », précise le photographe. L'espace donc - sa complexité, la perception que nous en avons, sa plasticité - est à l'égal de la couleur une composante majeure des images de Gruyaert, comme si la dualité entre couleur et spatialité - sujet majeur des beaux-arts des siècles précédents - se dissolvait pour au final créer une oeuvre où seul importe le plaisir de l'immersion.
Basculer dans l'image, dissoudre les frontières entre espaces extérieur et intérieur, monde clos ou au contraire ouvert sur l'ailleurs : Between Worlds offre une immersion sensorielle. Peu importe les lieux (boutiques, gares, cafés, métros, chambres d'hôtel, malls...), les pays (Europe, Moyen-Orient, Asie, États-Unis, Afrique...), l'époque (des années 1970 à aujourd'hui), le photographe déploie ici l'essence même de son écriture visuelle : une alchimie lumineuse dans un temps suspendu. Où sommes-nous ? Peu importe, seul règne le délice de se perdre. Au fil d'un editing réalisé comme un « carottage » dans ses archives, Harry Gruyaert montre qu'au-delà du merveilleux coloriste qu'il est, ses images, avec leurs jeux de transparences et de mise en abyme, racontent aussi l'illusion du monde.