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On ne peut s'étonner qu'une vie qui sort à ce point de l'ordre commun reste l'objet d'un intérêt aussi intense. D'ensemble ou dans les détails, longtemps on racontera l'histoire merveilleuse de Napoléon Bonaparte. À égale distance de tout parti-pris, nous avons essayé d'écrire son histoire naturelle. Il avait coutume de dire : « Pourquoi et comment sont des questions si utiles qu'on ne saurait trop se les faire. » Nous nous les sommes faites sur lui-même. Et nous avons tenté, en composant une biographie continue, en laissant toujours le personnage sous les yeux du lecteur, d'apporter des réponses aux « pourquoi » et aux « comment » qui viennent à l'esprit de tous ceux qui ont le goût et la curiosité de se rendre compte des choses. Napoléon disait encore de Tacite, en qui il voyait seulement le plus grand coloriste de l'antiquité : « Il ne fait pas connaître les motifs qui ont poussé les hommes à faire les actions. » Nous voudrions comprendre et expliquer la carrière de Napoléon Bonaparte, en établir l'enchaînement, retrouver les « motifs » qui l'ont « poussé », les raisons qu'il a pu avoir de prendre tel parti plutôt que tel autre. Nous avons tenté de discerner les causes générales et particulières d'une fortune qui tient du prodige et d'événements qui semblent forgés par un conteur oriental.
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Il y a probablement des centaines de siècles que l'Homme s'est répandu sur la terre. Au-delà de 2 500 ans, les origines de la France se perdent dans les conjectures et dans la nuit. Une vaste période ténébreuse précède notre histoire. Déjà, sur le sol de notre pays, des migrations et des conquêtes s'étaient succédé, jusqu'au moment où les Gaëls et Gaulois devinrent les maîtres, chassant les occupants qu'ils avaient trouvés ou se mêlant à eux. Ces occupants étaient les Ligures et les Ibères, bruns et de stature moyenne, qui constituent encore le fond de la population française. La tradition des druides enseignait qu'une partie des Gaulois était indigène, l'autre venue du Nord et d'outre-Rhin, car le Rhin a toujours paru la limite des Gaules. Ainsi, la fusion des races a commencé dès les âges préhistoriques. Le peuple français est un composé. C'est mieux qu'une race. C'est une nation.
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Ce n'est pas parce qu'un auteur anglais a écrit les Conséquences économiques de la paix que nous avons composé cet ouvrage. Ce livre n'est pas une réponse à Keynes. On le verra tout de suite. Nous voulons marquer seulement, à l'introduction de ces pages, un contraste singulier. Après une guerre qui a mis en jeu les forces et les ressorts des principaux États du monde, l'idée même de politique est tombée dans le discrédit. Peut-être faisait-elle mal à la tête ? Il est vrai que jamais matière aussi vaste et aussi confuse ne s'était offerte à des conducteurs de peuples chargés d'établir une grande paix. Raison de plus pour réfléchir et pour prévoir beaucoup. Le calcul pouvait être fatigant. Faute de calcul, une part énorme de l'avenir a été livrée à l'inconnu et au hasard, une part qui dépasse à l'excès les limites que rencontrent les intelligences les plus profondes lorsqu'elles s'appliquent à diriger le cours des grandes affaires.
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II y a bien, bien longtemps, dans un temps si lointain que les arrière-grands-parents de nos arrière-grands-parents n'ont pas pu le connaître, notre pays s'appelait la Gaule. Il était couvert d'immenses forêts. Et Paris n'était qu'un petit village qui tenait dans une île de la Seine. Ses habitants, qui s'appelaient les Gaulois, étaient de haute taille et ils portaient de longues moustaches qui leur donnaient un air guerrier. Ils aimaient par-dessus tout à entendre de beaux discours et à se battre. Ils étaient si braves, qu'ils disaient : « Nous ne craignons qu'une chose, c'est que le ciel tombe sur nos têtes. »
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Nos pères, qui en savaient bien autant que nous, avaient coutume de dire, qu'une fortune est plus difficile à conserver qu'à acquérir. Ils disaient aussi qu'une fortune ne passe pas trois générations. C'est ce qu'exprimait le proverbe de la vieille France : « Cent ans bannière, cent ans civière ». On a toujours su qu'il n'était pas bon de mettre tous ses oeufs dans le même panier. Mais le principe de la division des risques a pu être appliqué avec une facilité inconnue au temps jadis dès que la diffusion des valeurs mobilières eut permis de placer de l'argent dans les quatre parties du monde, par un simple ordre d'achat donné à la Bourse. C'est au milieu d'une immense révolution économique que nous vivons. Et une révolution économique entraîne fatalement une révolution sociale, à forme silencieuse ou explosive : peu importe. L'effet est le même pour les individus.
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Histoire de Deux Peuples : Continuée jusqu'à Hitler
Jacques Bainville
- Libellio
- 18 Juillet 2022
- 9788412565829
Le sol de la France était occupé par l'ennemi qui se tenait, dans ses tranchées, à quatre-vingts kilomètres de la capitale. Lille, Mézières, Saint-Quentin, Laon, vingt autres de nos villes étaient aux mains des Allemands. Guillaume II célébrait son anniversaire dans une église de village français. Tous les jours, Reims ou Soissons étaient bombardées. Tous les jours un frère, un ami tombait. « Fallait-il que nous revissions cela », disaient les vieillards qui se souvenaient de 1870. Deux invasions en moins d'un demi-siècle ! Comment ? Pourquoi ? Était-ce l'oeuvre du hasard ou bien une fatalité veut-elle que, tous les quarante-quatre ans, l'Allemagne se rue sur la France ? Lorsqu'on se pose ces questions, la curiosité historique est éveillée. La réflexion l'est aussi...
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Sainte-Beuve remarque dans ses Lundis que les trois mots qui caractérisent les principales époques de la Révolution ont été prononcés par Sieyès, homme sentencieux. Au mouvement de 1789, il avait donné sa formule : « Qu'est-ce que le Tiers-État ? Rien. Que doit-il être ? Tout. » De la Terreur, Sieyès disait simplement : « J'ai vécu. » À la fin du Directoire, il murmurait : « Je cherche une épée. » La Révolution en était là en 1799. Elle avait besoin d'une épée, d'un militaire et d'un coup d'État.
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La vie de Louis II de Bavière n'est pas à proposer en exemple, et Plutarque lui-même n'en aurait pas tiré de leçon. Ce n'est qu'une espèce de féerie assez mélancolique. Ce qui est curieux encore, c'est que ce souverain d'esprit faible n'ait pas été un si mauvais roi. À la tête d'un État important, et dans des circonstances difficiles, il a fait, en somme, ou laissé faire, tout ce que la Bavière pouvait espérer de mieux. C'est déjà beau, et c'est même très beau, quand on songe aux catastrophes qui n'auraient pas manqué de survenir, s'il avait mis dans sa politique une petite moitié du romantisme qui a désolé sa vie privée. Cet extravagant a très convenablement exercé son métier de roi.