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Galilee
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Ce livre ne s'occupe pas de savoir comment les concepts freudiens s'appliquent à l'interprétation des oeuvres littéraires et artistiques.
Il se demande pourquoi cette interprétation occupe une place stratégique dans la démonstration de la pertinence des concepts analytiques. pour que freud fasse de l'intrigue oedipienne un principe d'intelligibilité, il faut d'abord qu'un certain å'dipe, appartenant à la réinvention romantique de l'antiquité grecque, ait produit une certaine idée de la puissance de pensée de ce qui ne pense pas et de la force de parole de ce qui se tait.
Il ne s'ensuit pas que l'inconscient freudien serait déjà préfiguré par l'inconscient esthétique. les analyses " esthétiques " de freud montrent bien plutôt une tension entre la logique des deux inconscients. ce texte tente d'indiquer les modalités et les enjeux de cette confrontation.
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on accusait hier l'esthétique de dissimuler les jeux culturels de la distinction sociale.
on voudrait aujourd'hui délivrer les pratiques artistiques de son discours parasite. mais l'esthétique n'est pas un discours. c'est un régime historique d'identification de l'art. ce régime est paradoxal, car il ne fonde l'autonomie de l'art qu'au prix de supprimer les frontières séparant ses pratiques et ses objets de ceux de la vie ordinaire et de faire du libre jeu esthétique la promesse d'une révolution nouvelle.
l'esthétique n'est pas politique par accident mais par essence. mais elle l'est dans la tension irrésolue entre deux politiques opposées : transformer les formes de l'art en formes de la vie collective, préserver de toute compromission militante ou marchande l'autonomie qui en fait une promesse d'émancipation. cette tension constitutive explique les paradoxes et les transformations de l'art critique.
elle permet aussi de comprendre comment les appels à libérer l'art de l'esthétique conduisent aujourd'hui à le noyer, avec la politique, dans l'indistinction éthique.
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La politique de la littérature n'est pas celle des écrivains et de leurs engagements. Elle ne concerne pas non plus la manière dont ils représentent les structures sociales ou les luttes politiques. L'expression " politique de la littérature " suppose un lien spécifique entre la politique comme forme de la pratique collective et la littérature comme régime historiquement déterminé de l'art d'écrire. Ce livre s'attache à montrer comment la révolution littéraire bouleverse de fait l'ordre sensible qui soutenait les hiérarchies traditionnelles, mais aussi pourquoi l'égalité littéraire déjoue toute volonté de mettre la littérature au service de la politique ou à sa place. Il met ses hypothèses à l'épreuve sur quelques écrivains: Flaubert, Tolstoï, Mallarmé, Brecht, Borges, et quelques autres. Il en montre aussi les conséquences pour l'interprétation psychanalytique, la narration historique, ou la conceptualisation philosophique.
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La mésentente ; politique et philosophie
Jacques Rancière
- Galilee
- La Philosophie En Effet
- 24 Janvier 1995
- 9782718604503
« Le mot de philosophie politique ne désigne aucun genre ou territoire de la philosophie. Il est le nom d'une rencontre polémique où s'exprime le paradoxe de la politique : son absence de fondement propre.
La politique commence quand l'ordre naturel de la domination et la répartition des parts entre les parties de la société sont interrompus par l'apparition d'une partie surnuméraire, le démos, qui identifie la collection des incomptés au tout de la communauté. L'égalité, qui est la condition non politique de la politique, ne fait effet que par le jeu de cette partie litigieuse qui institue la communauté politique comme communauté du litige. À partir de ce mécompte premier s'institue une logique de la mésentente, également éloignée de la discussion consensuelle et du tort absolu.
La «philosophie politique», elle, commence avec la récusation platonicienne de l'apparence, du mécompte et du litige propres à la démocratie, et la requête d'une politique «en vérité». On s'interrogera sur les transformations du régime de cette vérité, de l'archipolitique platonicienne à la métapolitique marxienne, et sur leurs effets en retour dans la pratique politique.
De là peuvent se déduire quelques repères pour analyser aujourd'hui la complémentarité de l'idylle consensuelle et du mélodrame humanitaire, tout comme l'équivalence de la «fin» de la politique et de son «retour» ».
J. R.