Doté d'une puissante charge poétique, ce pur chef-d'oeuvre de la tradition mystique musulmane et de la littérature arabe classique consiste en une parole elliptique, énigmatique, incisive, qui demeure rétive à tout déchiffrage symbolique, ainsi qu'à toute réduction rationnelle. Sa découverte dans les années 1960 a exercé une profonde influence sur la poésie arabe moderne. Toute la vie de Niffari, mystique errant, était une quête de l'Absolu, et tout dans son oeuvre est transcendance. Celle-ci impose sa propre forme expressive, qui se place par-delà la distinction entre prose et poésie, entre poésie et pensée, pour inaugurer ce que Sami-Ali, traducteur des Haltes, appelle une poésie de la pensée.
Le Livre des Extases est un de ces textes qui tisse vertiges et vertiges, et, en les tissant, nous ouvre des abîmes à chaque fois que nous en saisissons la teneur.
Car cet écrit du Xe siècle, oeuvre d'un auteur dont aucune information biographique n'a été transmise, mettant en scène un dialogue du poète avec le Créateur, demeure en permanence ouvert. Dans ce texte, l'être humain est un sujet, mais en dialogue avec le divin, qui lui dit de « ne pas s'incliner », et l'enjoint à une liberté, en même temps que l'humanité doit tout à cette injonction. L'horizon est islamique, celui des mystiques soufis, mais en réalité décrit, de cette véritable universalité qu'est l'humanité consciente de la séparation, l'expérience du sacré et de l'accomplissement, par lui, de l'humanité, de tout temps et à toute époque. La liberté de l'être humain est en jeu, dans son rapport à l'environnement, par le biais d'un parallélisme entre deux paysages, celui du monde intérieur, et celui des événements extérieurs.
On songe, en lisant ce texte, aux contes africains, aux poèmes grecs, aux récits des sages bouddhistes, aux mythologies mésopotamiennes anciennes, mais aussi aux jonctions impromptues d'images et de mots associées à la modernité occidentale - celle de Rimbaud et de Lautréamont, qui donne naissance au surréalisme, mille ans après la parole d'Al- Niffari ; parole du Créateur, parole du sujet, c'est surtout là une parole de l'humanité.
Doté d'une puissante charge poétique, ce pur chef-d'oeuvre de la tradition mystique musulmane et de la littérature arabe classique consiste en une parole elliptique, énigmatique, incisive, qui demeure rétive à tout déchiffrage symbolique, ainsi qu'à toute réduction rationnelle. Sa découverte dans les années 1960 a exercé une profonde influence sur la poésie arabe moderne. Toute la vie de Niffari, mystique errant, était une quête de l'Absolu, et tout dans son oeuvre est transcendance. Celle-ci impose sa propre forme expressive, qui se place par-delà la distinction entre prose et poésie, entre poésie et pensée, pour inaugurer ce que Sami-Ali, traducteur des Haltes, appelle une poésie de la pensée.