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marina skalova
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Parti sans laisser d'adresse
Levin Westermann
- Cheyne
- D'Une Voix L'Autre
- 23 Janvier 2025
- 9782841163519
Poésie des fins et des commencements, de l'intermède, de la couture, de la distance. Poésie encore des lisières, des bordures, des restes et des débris. De tout ce qui s'absente. De tout ce qui part sans laisser d'adresse. La poésie de Levin Westermann, dans ce premier livre traduit par Marina Skalova, a la netteté coupante des constats. Le poète est un arpenteur toujours entre deux lieux et ses poèmes ont la précision des lames parfaitement affûtées : ils tranchent les illusions, rien ici qui soit du beau discours.
Si la beauté advient dans Parti sans laisser d'adresse, c'est toujours à l'intérieur de cette fracture entre le monde et le poète : « la perfection, écrit Levin Westermann, se révèle seulement dans le manque. » -
intiment [3e personne du pluriel ] est une tentative de généalogie : extraire la violence - une violence structurelle, ancrée dans la langue russe entendue depuis la petite enfance - qui a jalonné le parcours d'un personnage féminin. Ressurgissent des phrases, des gestes, des chansons, les particules d'une mémoire intime qui l'ont façonné. Des passages plus documentaires fonctionnent en écho aux scènes consacrées à l'intimité de « tu » - l'ensemble forme un tout, mettant en exergue un système, par-delà les frontières russes.
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Verdicts est un livre de poésie composé à partir de jugements prononcés par des tribunaux russes entre 2012 et 2017, notamment dans des affaires de féminicides, d'infanticides ou de meurtres homophobes. Ces extraits judiciaires, d'une violence inouïe, constituent une chronique de la vie quotidienne des provinces périphériques russes, meurtries par la misère, l'alcoolisme ou l'arbitraire de l'État. Par un travail d'amplification performative, Verdicts montre que l'intime des corps des citoyens est l'un des premiers lieux où un régime autoritaire vient imprimer sa marque.
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Atemnot (Souffle court) est un recueil composé de vers brefs et incisifs, écrits en français et en allemand.
Chaque poème se tient au seuil de l'autre langue. La langue est à la fois limite et lieu de réinvention. Comme à travers un miroir vacillant, les poèmes en montrent l'instabilité. Un corps se heurte à d'autres corps. Le corps traverse des langues et des territoires. Chaque langue est étrangère. Une voix tente de lier. Alors que l'air manque, violence intime et fracas extérieur se font écho. Les poèmes marquent la quête d'un territoire respirable. Comme un souffle tenu, un mince filet d'air sinuant entre les langues. -
Galina Rymbu est née en Sibérie en 1990. Voix majeure de la poésie contemporaine russe elle fait un constat brillant et sans concession d'un monde post-soviétique en décrépitude, où la misère seule a su s'installer, et le fascisme de moins en moins rampant.
Son écriture vibre, elle doit conjurer la peur et inspirer la lutte. Une prise de liberté qui se fait par le corps, l'écriture est charnelle, la révolution naîtra d'une réappropriation des sens et de la langue. Galina se transcende sous nos yeux, exaltée, presque mystique, elle lutte par-delà les frontières du réel, « monde d'une seule signification » pour créer une langue à même de construire une communauté capable d'un autre avenir.
C'est inspiré et puissant, tout ce qu'on rêve de la poésie russe !
Mais voilà, depuis 2017, Galina Rymbu est réfugiée à Lviv, en Ukraine, avec sa famille. Tu es l'avenir s'ouvre sur le poème traces, une lecture suffocante, où la poésie apparaît comme tout dernier refuge. -
En 1941, le directeur du crématorium de Moscou, Piotr Nesterenko, est arrêté. Il sait mieux que personne ce qui arrive aux victimes des Grandes Purges staliniennes. Opposants, espions présumés, anciens héros de la révolution, tous victimes des répressions - il les a tous incinérés. Au fil des interrogatoires successifs, il doit répondre de sa vie tumultueuse : officier de l'Armée blanche qui a fui les bolcheviks jusqu'en Ukraine, survivant d'un accident d'avion, émigré à Istanbul puis à Paris, amoureux fidèle à la passion de sa jeunesse... Un jeu du chat et de la souris commence entre le prisonnier et son commissaire-enquêteur, brouillant les cartes entre le bourreau et la victime, la justice et le mensonge, le bien et le mal.
Sacha Filipenko entrelace avec virtuosité les documents historiques et la fiction ; maniant une ironie glaçante, il raconte une histoire macabre, folle et fascinante, depuis l'intérieur d'un État totalitaire. -
Mêlant passé, présent et avenir, Polo kouman (Polo parle) est le nouveau recueil poétique de Henri Michel Yéré. Ecrit en nouchi et en français, sous la forme d'un dialogue poétique entre Polo et l'Avenir, il démontre que la poésie possède, parmi l'éventail de ses pouvoirs, celui d'outrepasser la linéarité du temps et celui de démultiplier nos visions. Puisant dans les deux langues ce qu'elles ont de plus privé pour le révéler par la parole, les poèmes se répondent les uns aux autres et ne se ressemblent pas. Malgré l'abandon de ses ancêtres, Polo résiste, rêve et éprouve les désolations de l'existence et les espoirs qui en découlent. Si les visions sont multiples, une seule certitude émerge de ce recueil?: lorsqu'il y a dialogue, toute solitude finit par disparaître.
" À ceux qui prétendent que je ne parle pas français?: je veux dire que ma parole démolit les murs. Ceux qui m'ont entendu sont transformés ".
Préface de Marina Skalova. -
La chute des comètes et des cosmonautes
Marina Skalova
- L'Arche
- Scène Ouverte
- 11 Septembre 2019
- 9782851819659
Ce road-trip poéti que de deux êtres à la dérive est une explorati on de la chute de l'URSS et des idéologies politi ques. Sa fable entrelace l'inti me, l'exil et le voyage : une jeune astrophysicienne et son père prennent la route pour un Paris-Moscou en voiture, l'une habitée par une décepti on senti mentale, l'autre hanté par un senti ment de déracinement profond.
Tout au long du voyage, LUI et ELLE se querellent, s'aff rontent comme deux systèmes en perte d'utopie. Sous la plume de Marina Skalova, les heurts de l'Histoire viennent s'inscrire en creux chez les individus, interrogeant la possibilité d'une acti on politi que face à la dérélicti on contemporaine et la perte des valeurs collecti ves.
Des séquences dialoguées, souvent comiques, alternent avec des moments de décrochage. S'aff ranchissant par-là d'un réalisme trop formel, elle crée des espaces de divagati on, de plongées dans une intériorité profonde, des secousses quasi métaphysiques et ludiques à la fois - comme des trous d'air dans l'atmosphère.
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Trouer la brume du paradis
Marina Skalova
- Héros-Limite
- Revue L'Ours Blanc
- 17 Novembre 2023
- 9782889550920
Avec Trouer la brume du paradis, Marina Skalova poursuit son vaste projet, initié en 2019 à la suite d'une résidence de trois mois à Moscou. Il s'agit pour la poétesse et traductrice d'origine russe « d'ouvrir un chantier littéraire autour de la place des femmes en Russie soviétique », ainsi qu'elle le décrit elle-même. Son texte est une introduction à la vie et à l'oeuvre de Yanka Diaghileva, comète qui brilla brièvement à la fin des années 80 sur la scène punk d'une Union soviétique à l'agonie. Elle a 25 ans lorsque son corps est repêché sans vie dans les eaux de la rivière Inia, en Sibérie. Les raisons de sa mort n'ont jamais été réellement élucidées.
Marina Skalova traduit et commente un ensemble de textes de Yanka. Des mots écrits dans une langue abrupte, qui charrie des images étranges, imprégnées d'éléments folkloriques et mythologiques. Qu'il s'agisse de paroles de chansons ou de poèmes, ils racontent une existence orientée par l'urgence et la précarité, mais aussi par la nécessité de ne pas plier aux exigences d'un État dictatorial moribond. Yanka est la figure de proue d'un punk sibérien sorti de rien, pour venir «trouer la brume du paradis» dans laquelle aime à se dissimuler l'enfer des régimes totalitaires. « Au bord des pôles, il y a des milliers de kilomètres de rien, ou de presque rien. Dans ce presque réside la différence. Le presque est la brèche d'où le punk peut surgir. » En interrogeant la figure de femmes écrivaines, poètes, et, avec ce texte, de la chanteuse-compositrice exceptionnelle que fut Yanka Diaghileva, Marina Skalova construit une généalogie de son écriture de femme occidentale qui ne veut pas oublier son enracinement dans une tradition littéraire russe, anarchiste et radicale, qui a toujours refusé de céder à toute forme d'oppression - quel que soit le prix à payer. -
Silences d'exils est un projet entrelaçant le langage des mots et celui des images, conduit par Marina Skalova, écrivain et Nadège Abadie, photographe.
Le projet est né d'une réflexion sur la dépossession de la langue, qui caractérise les trajectoires migratoires. La notion de Sprachlosigkeit en allemand, qui désigne à la fois une perte et un mutisme, est à l'origine de ce projet. L'expérience de cassure, de brisure de la langue, propre à la situation des migrants, est au coeur de la démarche de Silence d'exils.
Depuis 2016, les deux artistes ont proposé des ateliers bilingues d'écriture et de photographie auprès de demandeurs d'asile dans le cadre d'une résidence de trois semaines à C-FAL Genève, puis à Bienne et à Neuchâtel. Les ateliers se sont ensuite poursuivis au cours de l'année 2017. Les textes, images et sons créés à partir des ateliers, par les deux artistes et les participants, ont donné lieu à la création d'une exposition interdisciplinaire, présentée pour la première fois à C-FAL à Genève en automne 2016. L'exposition a ensuite été accueillie au théâtre POCHE/GVE à Genève en automne 2017, puis par la Fondation Bibliomedia à Lausanne au printemps 2018, dans le cadre du Printemps de la poésie.
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À partir de la notion de flux, si employée, si dévoyée dans le grand bavardage, Marina Skalova retrace l´emballement qui a conduit l´Europe à abandonner sa politique d´asile, et ce faisant à renoncer à elle-même, elle qui s'est construite sur l'idée du « plus jamais ça ». Flux migratoires, flux des échanges financiers, flux corporels et flux marins se trouvent tous pris dans le même mouvement - un flux qui nous déborde et dans lequel on pourrait bien un jour se noyer.
Il est difficile de trouver une terre ferme sur laquelle poser ses chaussures. On cherche des mots auxquels se raccrocher. Mais les mots ne sont pas des bouées.
Pourtant, les mots de ce livre nous réveillent, et nous rappellent de quoi, jour après jour, nous sommes devenus, souvent malgré nous, les complices.
C'est parfois le sens de la littérature : réveiller.
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Le corps cille rend compte d'un accouchement, de la naissance vécue comme une dépossession de son propre corps ; un démembrement d'où surgissent des images de violence extrême. Mais peu à peu les poèmes se déploient et laissent libre cours à l'éclosion d'un « tu ». C'est d'abord une « virgule, avait dit le médecin » puis le surgissement d'un être humain. Contre-pied de la douleur, l'enfantement donne lieu à la tendresse et à l'émerveillement. Cette joie intense est surgissement, l'autrice nous fait découvrir les premières perceptions du monde à hauteur d'enfant. Les fragilités du corps féminin. L'ambivalence de la maternité. Les poèmes de Marina Skalova laissent entrevoir des moments de distorsion, de troubles, de vide, mais aussi de métamorphoses. Le corps cille est un livre sur le vacillement.
Ce recueil a été composé par couches successives, à la fois en français, en allemand et en russe, par juxtaposition, chevauchement. Tout au long du recueil l'espace de la page rend compte de ce dialogue entre les langues. Depuis la guerre en Ukraine, écrire en russe n'est pas anodin et questionne inévitablement le sens même de toute forme d'écriture. Les poètes de langue allemande ont traversé cette mise à l'épreuve. La littérature de langue française fait comme si tout cela ne la regardait pas. -
Un étranger accoste sur une île dont on ignore le nom, délesté de toutes formes d'attaches. Cette terre, longtemps rêvée, le rejette. Dès son arrivée, il éprouve sa différence. Des signes inquiétants apparaissent, une paranoïa insidieuse s'installe. Un tour de force linguistique, qui, habilement opéré par l'écriture poétique et incisive de l'auteure, confronte le lecteur à son propre rapport à l'autre.
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De février à février est un livre de poésie illustrée contre la guerre et l'oppression, réalisé par une artiste russe vivant à Moscou et qui signe ses oeuvres du pseudonyme de Varvara Prajka.
Réalisés en linogravure, technique permettant un rendu aux contours bruts et marqués, et déclinés en noir, gris et rouge, ses dessins traduisent des émotions profondes : douleur, colère, désespoir. Les textes qui les accompagnent évoquent des instants de vie et dénoncent la violence et la déshumanisation qui rongent son pays.
À la croisée de l'intime et du collectif, ce livre exprime la souffrance d'une artiste réduite au silence, tout en affirmant, envers et contre tout, la nécessité de résister et de ne jamais perdre espoir.
À un moment où les voix critiques en Russie sont de plus en plus réduites au silence, ce livre rappelle que l'art reste une forme essentielle de résistance.
"Ce livre entier est mon cri, la seule chose que je puisse faire." Varvara Prajka