L'homéopathie trône dans les vitrines des pharmacies et côtoie dans nos foyers les vrais médicaments, des publicités en vantent les bienfaits, des politiciens, des sportifs, des célébrités la défendent avec ardeur. Des médecins la célèbrent. Présente depuis plus de deux cents ans, utilisée par des millions de gens, elle semble aller de soi. Mais la connaissez-vous vraiment?? Comment a-t-elle été inventée?? Sur quels principes théoriques repose-t-elle?? Comment les célèbres granules sont-ils fabriqués?? Comment mesure-t-on leur efficacité?? Que dit la science de ses effets revendiqués?? Comment les homéopathes répondent-ils aux critiques?? Comment les médias traitent-ils le sujet?? Que disent les autorités de santé de cette pratique aux relents idéologiques des plus détestables qui pourtant se veut une panacée parée de toutes les vertus?? Ne pas savoir répondre à ces questions, c'est ne rien savoir sur l'homéopathie. Thomas C. Durand explore dans ce livre les arcanes nébuleux d'une industrie prospère et d'un mode de pensée inquiétant.
«?Qu'est-ce que la science... pour vous???».
Telle est la question posée ici à des scientifiques, des philosophes, des historiens des sciences, des médiateurs et amateurs de sciences.
Simple question certes, mais pas une question simple... Où est la vraie difficulté?? Définir la science ou accepter de se confier, loin du surplomb procuré par les piédestaux académiques?? C'est pourquoi les 50 auteurs de ce tome 1 apportent des réponses variées, contrastées, éclectiques, que l'on peut décrire selon un gradient allant des textes les plus intimes et personnels à ceux qui observent scrupuleusement les codes de la prose universitaire. C'est qu'il n'est pas aisé de se dévoiler quand on aborde cette question essentielle, laquelle permet de délimiter un domaine majeur de la connaissance, aussi vaste et varié soit-il.
Les réponses sont brèves - quelques pages - afin de condenser ce que les auteurs pensent parfois depuis des décennies. La concision demandée est presque à voir comme une contrainte oulipienne. Ainsi, les lecteurs peuvent lire une quintessence de points de vue, un instantané de pensée, la part sensible, parfois, des membres de cet informel aréopage.
Théories, expériences, modélisations et controverses sont constitutives du développement des sciences de la nature, telles que la physique, la chimie, la biologie, ou la géologie. Cet ouvrage de philosophie défend le point de vue selon lequel l'étude de l'histoire des sciences est nécessaire pour les comprendre et pour reconnaître que les théories scientifiques sont à la fois toujours plus puissantes, mais aussi presque toutes éphémères. L'auteur soutient que des connaissances scientifiques nombreuses et de grande portée résultent de tels allers-retours, ce qui justifie pleinement la thèse du progrès scientifique.
Une partie du livre est consacrée aux relations existantes entre les sciences de la nature et les mathématiques - celles-ci sont d'une autre essence que les premières?: leurs objets sont immatériels et intemporels. Pour cette raison, l'étroite association entre la physique et les mathématiques, mais aussi désormais entre la biologie et les mathématiques ne peut pas annihiler la distinction de nature entre elles. Le monde des mathématiques et celui des sciences naturelles demeurent à jamais distincts.
Une idée centrale ici défendue est la suivante?: s'il y a bien progrès des connaissances scientifiques, il y a aussi et surtout accroissement de ce que les humains ignorent au sujet de la nature, de l'Univers et de la vie. Chaque découverte apporte plus de questions nouvelles que de réponses. En revanche l'intensité de notre dialogue avec la nature s'accroît spectaculairement grâce à l'activité scientifique.
L'auteur présente enfin des arguments pour soutenir que les sciences et les techniques sont deux réalités et deux genres d'activités fondamentalement distinctes?; Albert Einstein n'est pas plus responsable de la bombe à hydrogène, que Galilée de l'artillerie, ou Darwin de l'eugénisme.
Les rencontres « Physique et interrogations fondamentales » (PIF) sont l'occasion pour des scientifiques de formations très différentes, de confronter leurs points de vue sur un thème lié aux grandes questions de la science contemporaine. Elles se situent à un niveau permettant à un public cultivé mais non spécialisé de suivre les exposés. Elles se tiennent tous les deux ans dans le grand amphithéâtre du site François Mitterrand de la Bibliothèque nationale de France qui les coorganise avec la Société française de physique. La onzième édition de PIF a été consacrée à une mise au point sur les modèles et les simulations, omniprésents dans la pratique des sciences et techniques contemporaines comme le démontre l'éventail des contributions ici rassemblées. Alors qu'idéalement la méthode scientifique confronte théories et expériences qui s'adressent directement à l'objet étudié, les modèles complètent souvent une théorie inachevée, voire remplacent une théorie inexistante et décrivent tout ce qui est considéré comme bien connu dans un dispositif expérimental donné, pour ne laisser indéterminé que ce qui se rapporte à la question posée.
La question de la part de réalité que ces modèles englobent est donc fondamentale. La simulation, qui est la méthode de choix pour résoudre des modèles trop complexes pour se prêter à un calcul exact, constitue, d'une certaine façon, une modélisation au second degré dont l'adéquation doit elle aussi être soigneusement mise à l'épreuve.
Depuis le congrès Solvay de 1927, le point de vue de Bohr, Born, Pauli et d'Heisenberg s'est imposé à toute la science contemporaine contre celui d'Einstein, de Broglie et de Schrödinger? : il faudrait dorénavant renoncer au déterminisme et à l'existence d'une réalité objective, mais aussi à la possibilité d'une compréhension du monde physique. L'objectif principal de ce livre est de faire connaître l'onde pilote de Broglie-Bohm, une interprétation alternative qui conserve déterminisme et réalisme et qui faisait dire à John Bell : « Pourquoi l'image de l'onde pilote est-elle ignorée dans les cours? ? Ne devrait-elle pas être enseignée, non pas comme l'unique solution, mais comme un antidote à l'autosatisfaction dominante? ? Pour montrer que le flou, la subjectivité, et l'indéterminisme, ne nous sont pas imposés de force par les faits expérimentaux, mais proviennent d'un choix théorique délibéré? ? » Ce livre étudie les limites de l'onde pilote de Broglie-Bohm et en cherche un dépassement. La « ?théorie de la double préparation? » proposée par Michel et Alexandre Gondran dépend des conditions de préparation du système quantique et correspond à une réponse à la « ?théorie de la double solution » que de Broglie a recherchée toute sa vie. Elle permet de mieux comprendre les points de vue d'Einstein, de Broglie et de Schrödinger. Enfin, les auteurs montrent qu'il existe des interprétations de la relativité générale compatibles avec la théorie de la double préparation. Elles permettent une vision commune entre mécanique classique, mécanique quantique et relativité générale dans un espace à quatre dimensions.
Face à l'irruption de la Covid-19, ont surgi des demandes urgentes de prédire, d'expliquer et de faire comprendre sa diffusion aussi bien géographique que sociale, notamment lorsqu'il s'agissait de soutenir telle ou telle décision politique ou de santé publique (distanciations, confinement, etc.). Plusieurs modèles computationnels - en particulier à agents - ont été bien vite mis en avant. Mais dans quelle mesure sont-ils réellement à même de remplir de telles fonctions, en particulier dans un contexte aussi contraint et variable?? Ce livre propose un ensemble d'analyses précieuses et salutaires pour qui voudra former son jugement à ce sujet. Il s'appuie sur des exemples et des analyses de plusieurs modèles de diffusion de la Covid-19, dont certains ont été utilisés par les pouvoirs publics. Il propose aussi des modèles alternatifs, dont certains inédits. Il s'adresse à un large lectorat. Les analyses techniques y sont effectuées avec beaucoup de pédagogie, sans sacrifier à la précision. Elles peuvent donc intéresser les concepteurs et utilisateurs de modèles, les étudiants, les élus, les associations concernées et tout citoyen soucieux de comprendre ces outils omniprésents. Au-delà du cas de la Covid-19, on y trouve une mise en perspective et une discussion plus générale concernant l'usage des modèles formels en sciences sociales, en particulier dans le cadre de l'aide à la décision publique. Analysant le contexte de la crise que l'on traverse, les auteurs évitent de donner un point de vue personnel, mais au contraire tentent d'aider chacun à avancer dans sa propre réflexion, en mettant en avant les questionnements qui peuvent s'adosser aux modèles présentés.
L'ouvrage comprend deux parties?: l'une qui propose une analyse critique de modèles existants, l'autre prenant la forme de trois propositions de modèles qui permettent de percevoir la richesse et la multiplicité des modèles agents de diffusion de maladie - à la fois dans leur conception et leur manipulation. Un glossaire et un intermède sur les «?apports des modèles agents en général et pour la Covid-19 en particulier?» replacent ces réflexions dans le cadre plus large de la simulation agents appliquée aux sciences sociales.
Les essais précoces sont les tests de première administration d'une molécule chez l'être humain. En cancérologie, les essais précoces modernes sont «?ciblés?»?: identi?ées comme candidates crédibles par des techniques bio-informatiques, les molécules à l'essai visent des cibles protéiques anormales caractéristiques de tel type moléculaire de tumeur. L'imagerie fonctionnelle permet d'observer si elles atteignent leur cible, si la tumeur diminue. Les essais précoces ciblés sont au coeur de la médecine «?personnalisée?», c'est-à-dire des nouvelles stratégies de traitement sur mesure selon le profil moléculaire de la tumeur d'un individu donné.
Les essais précoces sont une voie d'accès à l'innovation thérapeutique pour les malades et une option de la prise en charge médicale qui peut être proposée bien avant les situations d'impasse thérapeutique avec les traitements classiques.
En cela, ils posent une multitude de questions nouvelles qui interrogent bien au-delà des essais en cancérologie. Comment allouer les places de manière juste?? Faut-il repenser la distinction fondatrice entre soins et recherche, centrale pour l'éthique et pour la réglementation?? Avec quelles conséquences sur la pratique clinique??
L'ouvrage, rédigé à l'issue d'un colloque au Collège de France par les spécialistes les plus en pointe sur ces questions - cancérologues, biologistes, philosophes, sociologues et juristes - apporte d'abord une clarification des notions en jeu?: essais précoces, médecine «?personnalisée?», thérapeutiques «?ciblées?». Les questions de justice que soulèvent ces essais sont ensuite exposées et discutées de manière particulièrement claire. Pour nourrir un débat que le?progrès des techniques rend chaque jour plus urgent.
Les collections de sciences naturelles de l'agglomération rouennaise trouvent leurs origines dans des pratiques scientifiques du XVIIIe siècle : constitutions de cabinets de curiosités et créations de jardins botaniques destinés à l'étude de la nature. Avec la Révolution française, l'histoire naturelle sort des cabinets des aristocrates et des ecclésiastiques pour être accessible à tous. À Rouen, le Muséum d'histoire naturelle témoigne de ce processus de démocratisation tant par sa fonction de laboratoire que par son action de vulgarisation scientifique. Par leurs qualités esthétiques et la richesse de leurs collections, les muséums locaux et les jardins publics attirent les foules et suscitent des vocations. Les politiques d'instruction publique oeuvrent enfin à la structuration et à l'orientation des savoirs scientifiques.
Cet ouvrage interroge et confronte ainsi les relations paradoxales entretenues entre la recherche et la vulgarisation scientifique dans l'agglomération rouennaise au XIXe siècle. In extenso, il offre un panorama des sciences naturelles dans cette ville où les débats scientifiques nationaux, voire internationaux, sont discutés, comme la génération spontanée ou encore l'évolution. L'ouvrage s'intéresse tout d'abord aux origines de la discipline à Rouen, avant 1789, à travers l'étude des premières collections privées, puis publiques spécialisées. Il s'attache par la suite aux structures scientifiques provenant de l'institutionnalisation des sciences naturelles au XIXe siècle : le Muséum d'histoire naturelle de Rouen et les jardins publics locaux. Enfin, il observe les modes et dispositifs de diffusion de cette science, en commençant par son enseignement et le rôle des sociétés savantes locales. Il se focalise de même sur la diffusion des théories scientifiques, les créations muséographiques de la Troisième République et les différents modes d'exhibition du vivant : spectacles anthropologiques, ménageries ou encore parcs zoologiques.
Cette perspective locale permet alors de saisir les enjeux scientifiques, politiques et sociologiques majeurs d'une discipline en pleine structuration. Elle souligne aussi bien les ruptures épistémologiques que les choix formels de la diffusion d'une science singulièrement esthétisée.
«?Qu'est-ce que la science... pour vous???».
Telle est la question posée ici à des scientifiques, philosophes, historiens des sciences, médiateurs et amateurs de sciences.
Simple question certes, mais pas une question simple... Où est la vraie difficulté?? Définir la science ou accepter de se confier, loin du surplomb procuré par les piédestaux académiques?? C'est pourquoi la cinquantaine d'auteurs de ce tome 2 apportent des réponses variées, contrastées, éclectiques, que l'on peut décrire selon un gradient allant des textes les plus intimes et personnels à ceux qui observent scrupuleusement les codes de la prose universitaire. C'est qu'il n'est pas aisé de se dévoiler quand on aborde cette question essentielle, laquelle permet de délimiter un domaine majeur de la connaissance, aussi vaste et varié soit-il.
Les réponses sont souvent brèves - quelques pages - afin de condenser ce que les auteurs pensent parfois depuis des décennies. La concision demandée est presque à voir comme une contrainte oulipienne. Ainsi, les lecteurs peuvent lire une quintessence de points de vue, un instantané de pensée, la part sensible, parfois, des membres de cet informel aréopage.
Quel est le point commun entre un escargot, une pâquerette et un lapin?? La réponse est simple?: tous trois ont pour particularité d'être des organismes, c'est-à-dire des êtres vivants dont les parties semblent avoir été configurées, voire «?optimisées?» en vue de la survie et de la reproduction du tout auquel elles appartiennent. Darwin, on le sait, fut le premier à suggérer une hypothèse pour expliquer l'apparente finalité de leur organisation - l'hypothèse de la sélection naturelle. Toutefois, il faudra attendre le dernier tiers du XXe?siècle pour que la question de la nature et de l'existence même des organismes ne fasse l'objet de nouvelles recherches, avec les théories biologiques de l'évolution sociale. À l'origine, ces théories furent développées en vue de rendre compte de la multitude des comportements prosociaux observés dans le monde vivant, allant de la simple attention d'un parent pour ses petits au sacrifice d'une abeille pour sa ruche, en passant par les interactions territoriales et sexuelles chez les animaux. Mais, dans les années 1980-1990, ces approches furent progressivement étendues pour expliquer le passage de l'état unicellulaire à l'état multicellulaire, révolutionnant par la même notre conception des organismes. Désormais, ceux-ci allaient être envisagés sur le mode de «?sociétés de cellules?», caractérisées par un haut niveau de coopération et un faible niveau de conflit. Dans ce livre, l'auteur propose une analyse philosophique détaillée des différents présupposés de ces théories, et envisage leurs implications conceptuelles concernant la définition de la notion d'organisme. Le caractère de cette analyse est à la fois épistémologique et ontologique, puisque son ambition est de montrer en quoi l'usage de méthodes et de concepts originellement destinés à expliquer l'évolution des sociétés biologiques peut nous amener, in fine, à repenser la frontière entre socialité et organismalité.
Pourquoi s'intéresser aujourd'hui à la distinction entre croire et savoir, dix ans après la première édition du livre?? La science ne s'est-elle pas libérée, depuis l'énoncé du postulat d'objectivité par Galilée et Descartes au XVIIe?siècle, du joug de la théologie et de la religion?? Ces deux penseurs n'ont-ils pas proscrit, dans l'activité scientifique, les causes finales?? Si l'on considère l'ampleur du mouvement créationniste qui veut s'immiscer dans l'enseignement des sciences et dans la théorie et la pratique scientifiques, on peut se dire qu'il est important de rappeler que la science et le domaine de la foi ont des droits séparés, que la première est l'indispensable instance cognitive du savoir sur les choses, les processus, les phénomènes, que la seconde ne saurait posséder aucun privilège ni préséance quant à ces savoirs.
Revenir aux moments de la formulation du postulat d'objectivité - lors de l'essor des sciences modernes puis des révolutions de la pensée mues par le mouvement des Lumières, notamment à travers les fermes résolutions d'Émilie du Châtelet - pour enquêter sur la manière dont la science s'est construite par l'affirmation de son indépendance à l'égard de toute référence à Dieu se révèle fort utile pour contrecarrer les tentatives de brouiller les cartes entre croire et savoir.
La triste et trouble période que nous vivons, celle d'un réarmement théologique des obscurantistes, celle du scepticisme irraisonné, rend ce livre d'une utilité, voire d'un soutien indispensables.
Cet ouvrage est un choix de textes sur l'histoire de la biogéographie historique et sur ses développements récents, découlant d'une part des progrès apportés à la systématique par la méthode phylogénétique de Willi Hennig, d'autre part des vues controversées de Léon Croizat sur la «?panbiogéographie?». Il comprend sept articles de Gareth Nelson, Norman Platnick, Colin Patterson et Robin Craw, qui comptent parmi les meilleurs théoriciens de la discipline.
La biogéographie, de Linné à de Candolle et à Darwin jusqu'aux auteurs les plus modernes?; les périls de la plésiomorphie et des taxa largement répandus?; le modèle de la vicariance?; les buts et méthodes actuelles de la discipline?; le problème du rôle des fossiles?; la panbiogéographie et enfin l'avenir possible de la biogéographie historique sont successivement traités. Une bibliographie de près de 200 références offre au lecteur l'accès aux monographies et ouvrages fondamentaux d'une branche entièrement renouvelée de la biologie comparée.
La singularité et l'universalité du vivant procèdent d'un double constat?: tout vivant est taillé dans la même étoffe que les autres systèmes matériels?; les systèmes vivants sont des entités matérielles différentes des autres systèmes avec lesquels elles partagent cette communauté matérielle. Voici donc le cadre général du questionnement auquel nous convie le livre de Gilbert Lechermeier.
Le vivant, singulier car il exhibe une organisation et des propriétés matériellement inédites, mais universel parce qu'il les déploie dans toutes ses instanciations, semblent se dérober à nos analyses les plus perspicaces tout en étant l'un des sujets de recherche scientifique et philosophique les plus opiniâtrement explorés. Phénomène éminemment multiple, la vie est nécessairement redevable d'approches multi et transdisciplinaires, nécessairement enchevêtrées?: la question des (non-)frontières est cruciale. C'est également le lieu épistémique d'une tension entre un réductionnisme analytique et une profusion empirique. Les définitions, pléthoriques et jamais complètes, brouillent l'idée spontanée qu'on se fait généralement de ce qui caractérise le vivant?; toutefois, elles sont des jalons utiles et ce livre nous aide à nous repérer afin d'éviter les risques permanents d'une essentialisation de la vie ou, à l'opposé, d'un nominalisme incontrôlable. Difficile de s'y retrouver tant le chemin de la compréhension du vivant est tortueux.
C'est pourquoi ce livre est utile car il présente et organise la cartographie profuse, fût-ce dans ses arcanes les plus subtils ou les plus opaques de ses définitions, des théories, des modélisation, des épistémologies, voire des soubassements ontologiques, qui ont été pensés depuis des centaines d'années au sujet du vivant. Là encore, Gilbert Lechermeier nous permet de mieux comprendre ce que nous sommes?: vivants parmi les vivants à s'interroger sur le vivant...
Le bayésianisme connaît un succès croissant dans des domaines du savoir toujours plus nombreux. Le présent ouvrage vise d'abord à présenter l'état actuel du bayésianisme dans ses différentes dimensions, de la logique et la philosophie des probabilités jusqu'à la pratique des sciences empiriques, en passant par la théorie statistique. Il prétend également interroger l'unité des approches bayésiennes, entre les disciplines et dans le temps. Enfin, il aborde la question de savoir quelle est la portée de ces approches et comment il convient d'interpréter leur succès. Faut-il, en particulier, considérer que la fécondité d'un modèle bayésien signifie que ce dont il est un modèle est bayésien (en un sens qui resterait à préciser)??
L'ouvrage se veut abordable par un lectorat certes motivé, mais pas nécessairement spécialiste. L'exposé est pluridisciplinaire et tous les auteurs sont familiers ou acteurs, en leur domaine, des développements les plus contemporains du bayésianisme. Il s'agit de faire comprendre l'intérêt des approches bayésiennes, parfois en les comparant aux méthodes plus classiques avec lesquelles elles viennent rivaliser, et en explorant un éventail de projets et de disciplines qui soit aussi large que possible. Un tel projet éditorial est inédit en français.
«?En France je n'ai pas entendu parler d'un seul zoologiste, à l'exception de M. Gaudry (encore ne le fait-il que partiellement) qui défende mes idées. » C'est ce qu'affirme Charles Darwin en 1870. Ce zoologiste-là est un paléontologue, aide-naturaliste au laboratoire de paléontologie du Muséum d'histoire naturelle. C'est à partir de sa lecture en 1863 de L'Origine des espèces et de la théorie de la descendance avec modification, qu'Albert Gaudry (1827-1908) oriente sa recherche en direction de la reconstitution des filiations. Il se justifie ainsi : avant l'élucidation des causes de la modification, la paléontologie a d'abord à reconstituer la descendance au travers de l'étude des modifications. Gaudry est le premier dans l'histoire à dessiner des arbres évolutifs reliant espèces éteintes et espèces actuelles en suivant le modèle darwinien. La science française en général et celle du Muséum en particulier ne sont alors pas darwiniennes et pourtant dans un contexte plutôt hostile, nommé en 1872 professeur de paléontologie au Muséum, Gaudry enseigne l'évolution et conçoit l'actuelle galerie de paléontologie du Muséum, la première à illustrer les transformations des êtres vivants. Si le Muséum, à l'inverse de la Sorbonne, du Collège de France, de l'Institut Pasteur, n'est pas passé à côté de Darwin il le doit entièrement au seul Albert Gaudry. Très isolé à ses débuts, celui-ci terminera sa carrière couvert d'honneurs et président de l'Académie des sciences. Sans doute en raison de son spiritualisme et de sa relative défiance vis-à-vis de l'omnipotence de la sélection naturelle, il restera dans les marges de l'histoire des sciences. Cependant, paradoxalement, il a mieux compris la notion de filiation que la plupart de ses contemporains et même, aussi étonnant que cela puisse paraître, des néodarwiniens du XXe siècle.
Ce numéro inaugural de la revue Metascience est aussi un numéro spécial puisqu'il rend hommage à Mario Bunge (1919-2020) pour souligner son apport à la connaissance et notre filiation avec sa pensée. Le projet de Mario Bunge s'inscrit dans la tradition humaniste et scientifique des Lumières. Au terme de son voyage intellectuel, il a écrit plus de 150 ouvrages et 540 articles ou chapitres, incluant les traductions dans plusieurs langues. L'oeuvre couvre presque toutes les branches de la philosophie, de l'ontologie à l'éthique, en passant par la sémantique, l'épistémologie, la méthodologie, la praxéologie et l'axiologie, ainsi qu'un grand nombre de disciplines scientifiques, allant de la physique à la sociologie, en passant par la chimie, la biologie et la psychologie. Sans contredit, le magnum opus de Bunge est le Treatise on Basic Philosophy en neuf volumes (1974-1989).
Les treize contributions réunies ici proviennent d'auteurs de différents horizons. Tout comme le projet de Bunge, elles ne s'inscrivent ni dans la mouvance analytique ni dans la mouvance continentale de la philosophie. Nous trouvons des études sur le système bungéen, des applications de la pensée bungéenne, des réflexions et des témoignages, et des contributions métascientifiques.
Du point de vue de la métascience telle que théorisée dans ces pages, Bunge est le dernier des philosophes et le premier métascientifique. Il garde de la philosophie l'idée d'un système complet qui intégrerait sémantique, ontologie, épistémologie, éthique, axiologie et praxéologie, mais il refuse de problématiser la connaissance scientifique de façon traditionnelle. Le résultat à de quoi surprendre?: même en acceptant la science telle qu'elle est, il trouve matière à questionnement.
Puisse Metascience être un lieu de questionnement et de déploiement de l'approche conçue par Mario Bunge.
La médecine de demain, entend-on parfois, verra son efficacité accrue par le recours à des technologies de pointe et l'élaboration d'un savoir individualisé. Anticiper les risques individuels de développer telle ou telle pathologie, collecter des données de santé, proposer un suivi personnalisé capable de ralentir les déclins insidieux, telle est la proposition des hérauts d'une médecine prédictive tournée vers la santé et sa préservation. Ces ambitions contemporaines suscitent tout à la fois inquiétudes, espoirs et fantasmes. D'où viennent ces promesses médicales ? Quel crédit leur accorder ?
Ce livre entreprend une généalogie critique de ces discours prospectifs et les réinscrit dans une histoire plus longue. On découvre alors un projet médical vieux de plus d'un siècle, lequel s'enracine dans la technique des examens périodiques de santé. L'ambition consistait à révolutionner les pratiques préventives en opérant une réorientation du regard médical, sommé de se détourner de l'étude des pathologies pour se consacrer enfin à l'étude des individus bien-portants. À de multiples reprises, des médecins et des scientifiques ont tenté d'objectiver la santé. Ils se mettent alors à collecter des données tous azimuts, sur des milliers d'individus sains, dans l'espoir de déceler les tendances annonciatrices de déclin.
Les outils de l'épistémologie historique sont ici mobilisés pour interroger la longévité d'une promesse médicale, en mettre à jour les ressorts et les ambiguïtés. Il s'agit de proposer des outils critiques permettant de mieux appréhender cette ambition médicale qui résonne encore aujourd'hui. L'éclairage historique et critique s'avère indispensable à notre compréhension des « médecines de demain ».
Jacques Monod (1910-1976), ancien directeur de l'Institut Pasteur, prix Nobel en 1965 en compagnie de ses collègues François Jacob et André Lwoff, a été parmi les fondateurs de la biologie moléculaire. Il est aussi connu du grand public cultivé du fait du succès de son livre Le Hasard et la nécessité, publié en 1970. Dix ans auparavant, il rédigeait un autre livre, synthèse de ses recherches sur l'«?adaptation enzymatique?», une des voies expérimentales qui devait mener à l'élucidation des mécanismes de régulation de l'activité des gènes. Cet ouvrage, qu'il intitula Cybernétique enzymatique, ne fut finalement jamais publié et demeura dans un carton, d'abord dans son bureau, puis dans le service des archives de l'Institut Pasteur.
C'est ce texte inédit, bilan de plus d'une décennie de travaux à la paillasse souvent menés conjointement avec Melvin Cohn, qui forme l'essentiel du présent volume. Il est accompagné d'un appareil critique visant à éclairer ce qui se joue au moment où Jacques Monod, en étroite collaboration avec François Jacob, s'apprête à élaborer le modèle de l'opéron lactose.
Le fonctionnement des êtres pluricellulaires nécessite l'interaction permanente entre les cellules qui les constituent. Cette «?communication biologique?», déjà présente chez les organismes les plus simples, implique l'émission et la réception de molécules de signalisation. à cette communication interne s'ajoute une communication avec l'environnement (organes des sens, alimentation, etc.).
Cet ouvrage décrit les deux principaux systèmes de communication?: le système nerveux et le système hormonal, et montre que les échanges de signaux au sein de l'organisme sont en fait bien plus complexes, car chaque cellule émet (et détecte) de nombreuses molécules de signalisation.
Il aborde ensuite le monde des récepteurs, membranaires ou nucléaires, chargés de détecter ces différents signaux et leur mécanisme d'action.
Les anomalies de ces systèmes de communication, liées à des défauts des systèmes émetteur-récepteur ou à des perturbations de facteurs de l'environnement, sont ensuite décrites avec des exemples de pathologies neurologiques, métaboliques et cancéreuses.
De nombreuses molécules d'origine naturelle ou anthropogène présentes dans l'environnement ou l'alimentation peuvent interagir avec certains de ces récepteurs. C'est le cas des médicaments, mais aussi des substances psychotropes et des perturbateurs endocriniens, qui posent de vrais problèmes de santé publique.
Enfin, nous vivons en symbiose avec les micro-organismes présents sur notre peau, mais surtout dans notre tube digestif. Ceux-ci, plus nombreux que nos propres cellules, sécrètent des molécules pour communiquer entre eux, mais celles-ci peuvent interférer avec nos propres systèmes de communication et modifier notre physiologie.