Catherine Breillat n'a jamais raconté qu'une seule histoire : la sienne, celle d'une jeune fille interdite d'existence qu'on aura, dès l'enfance, coupée en deux, écartelée entre son cerveau et son sexe, marquée par la honte d'être née femme. Elle est devenue cinéaste à une époque où choisir cette vocation consistait à désobéir à tout le monde.
Depuis son premier film, Une vraie jeune fille (1975), jusqu'à L'Été dernier (2023), elle filme pour reprendre ce qu'on lui a volé, pour explorer ce qu'elle appelle l'« infilmable » : cette inépuisable zone grise du féminin où honte, transgression, volupté, dégoût et quête de soi s'entremêlent jusqu'à se confondre. Son oeuvre formule un lancinant « Connais-toi toi-même », un voyage spirituel qui, pour ses héroïnes, s'articule comme une guerre ouverte avec l'autre sexe.
Parler avec Catherine Breillat et l'écouter, c'est obtenir des réponses qui tiennent autant de la leçon de cinéma que de la survie.
De sa naissance par ciel orageux dans le Massachusetts jusqu'à sa mort à Paris, la vie de Bette Davis n'a été qu'une infatigable lutte. Rien n'est assez bien, elle-même n'est jamais assez bonne. Comme actrice, comme femme, comme mère. Elle travaille dur et défend l'image d'une femme libérée du glamour d'Hollywood, des contrats des studios, des clichés sur la ménagère. Procès, ruptures, crises de colère, elle trace la voie d'un nouveau genre d'actrice, le genre qui obtient ce qu'elle veut ou part en claquant la porte. Elle fatigue maris et réalisateurs, pour le meilleur et pour le pire. Son acharnement nous vaut des prestations mémorables dans L'Insoumise, La Vie privée d'Élisabeth d'Angleterre ou Eve. De ville en ville, sur les planches des théâtres, dans la chaleur des studios et de ses maisons, entre les mains de ses amants et de ses maris, Bette Davis s'épuise à poursuivre un bonheur impossible.
Fin connaisseur de l'oeuvre de Jean Eustache, sur lequel il a déjà écrit à plusieurs reprises, Philippe Azoury trace le portrait d'un cinéaste torturé chez qui la vie et l'oeuvre sont nouées de manière inextricable, et dont les films servent encore aujourd'hui d'éducation sentimentale.
De son compagnonnage avec les Cahiers du cinéma dans les années 1960 jusqu'à son suicide en 1981, ce livre suit l'itinéraire atypique de cet héritier de la Nouvelle Vague et explore les formes et les motifs de son cinéma.
Lorsqu'elle disparaît en 1990, Delphine Seyrig n'est plus cette figure de proue du cinéma d'auteur mondial qu'elle fut durant toutes les années 60 et 70, de Marienbad au Charme discret de la bourgeoisie.
Les années 80 ne l'ont pas aimée ; dans cette décennie de restauration formelle et idéologique, son parcours, esthétique ou politique, paraissait trop radical. C'est peu dire que le temps a joué en sa faveur. La postérité a validé ses choix d'actrices les plus aventureux (chez Akerman ou Duras). Son oeuvre de cinéaste est redécouverte avec un intérêt croissant. Ses prises de position publiques, aux avant-postes de la lutte féministe, circulent plus que jamais sur les réseaux.
Quelles traces de son court passage laisse l'astre Seyrig ?
Tel sera l'objet de cet essai admiratif et amoureux.
«Trouvez-moi une autre blonde ! » aurait hurlé Harry Cohn, le puissant patron de la Columbia. Nous étions le 4 août 1962 et Marilyn Monroe venait de mourir.
En réalité, les studios cherchaient « une autre blonde » depuis dix ans. Les producteurs ont tous rêvé d'une nouvelle Marilyn, aussi désirable et rentable que l'originale, mais plus ponctuelle et disciplinée. Elles s'appelaient Jayne Mansfield, Diana Dors, Mamie Van Doren... et elles apprenaient à marcher, à parler et chanter comme Marilyn. La plupart de ces « ombres » ont été broyées par un système impitoyable et des démiurges qui ont cru pouvoir créer des comédiennes comme autant de produits manufacturés. Ombres de Marilyn rend hommage à ces femmes oubliées, à travers dix portraits, comme autant de chapitres d'un roman noir californien.
Enfant, Steve McQueen s'imaginait en nouveau Humphrey Bogart. Le rêve de ce gosse du Missouri a été exaucé. Les Sept Mercenaires, La Grande Evasion, Bullitt ou Guetapens ont fait de lui bien plus qu'une star. Il est devenu le king of Cool, icône virile et incarnation de l'individu roi américain. Son sang-froid recouvrait un caractère explosif, celui d'une graine de voyou passée par une maison de correction et les rangs des Marines.
Terreur des plateaux, l'acteur-pilote était mû par des forces aussi puissantes que contradictoires. Elles l'ont poussé à poursuivre la gloire autant qu'à lui tourner le dos, comme un appel à toujours fuir ce qu'il était. Steve McQueen a multiplié les échappatoires jusqu'à sa mort prématurée, à 50 ans. En étant persuadé cette fois de s'en aller au ciel.
Quelle image du futur Blade Runner de Ridley Scott a-t-il inventée ? Pour quelle raison Pier Paolo Pasolini a-t-il préféré tourner L'Évangile selon saint Matthieu en Italie après des semaines de repérage en Palestine ? Comment Jacques Demy et son décorateur Bernard Évein ont-ils métamorphosé la ville de Rochefort ? Pourquoi les plafonds sont-ils aussi bas dans Le Procès d'Orson Welles ?
Ce livre propose aux cinéphiles comme aux futurs professionnels du cinéma d'approcher les grands enjeux du décor. Particularités du cinéma vis-à-vis du théâtre et de l'architecture, incidences du tournage en studio ou en décors naturels, représentations du passé et du futur, trucages analogiques et numériques... Autant de grands thèmes qu'aborde Jean-Pierre Berthomé avant de consacrer treize études de cas à des films exemplaires de l'histoire du cinéma.
Spécialiste du décor de cinéma, Jean-Pierre Berthomé a écrit plusieurs livres et donné de nombreux enseignements, en France ou à l'étranger, sur ce sujet. Il est aussi l'auteur d'ouvrages sur Jacques Demy, Orson Welles ou Max Ophuls.
À Hollywood, elle a révolutionné les codes du glamour. À New York et Paris, ceux du style et de la mode. De Vacances romaines à Diamants sur canapé, en passant par Charade ou My Fair Lady, les chefs-d'oeuvre peuplent la filmographie d'Audrey Hepburn. Pourtant, c'est de son visage et de sa silhouette, d'abord, dont on se souvient. Tous les malheurs du monde et les drames intimes qu'elle a traversés - de son enfance sous la Seconde Guerre mondiale au début des années 90 - semblent s'éclipser derrière ce visage parfait, ce sourire bienveillant, ce regard accueillant, qui semblent dire que rien n'est grave, que tout va bien.
Lorsque Takeshi Kitano décroche le Lion d'or à Venise pour Hana-bi en 1997, le public japonais ne peut s'empêcher de penser qu'il vient de gagner à la loterie. Sur l'archipel, le cinéaste est d'abord Beat Takeshi, le saltimbanque du petit écran, capable d'animer jusqu'à huit émissions par semaine, déguisé en geisha ou en porc-épic géant. Mais depuis qu'il a quitté ses études de mécanique pour être comique dans des cabarets de strip-tease, le gosse de Tokyo n'a cessé de choisir seul qui il allait devenir, quitte à prendre tout le monde à contre-pied. Ou plutôt de ne pas choisir, à la fois humoriste le plus outrancier du pays, présentateur foutraque de jeux au succès planétaire, comédien sensible aux côtés de David Bowie dans Furyo et réalisateur de films d'avant-garde. Une improvisation au rythme effréné qui aura fait de lui une légende au pays du Soleil-Levant, avec tout ce que cela comporte de fantasque et de merveilleux.
C'est un livre sur les actrices, mais pas n'importe lesquelles. On y parle des « actrices sorcières », les bizarres, les méchantes, les trash, les punks, les cool, les marginales. Reliées par leur puissance de feu, toutes ont en commun de sortir du rang en incarnant la possibilité d'une autre voie : Asia Argento et Béatrice Dalle, Margaret Hamilton du Magicien d'Oz, la Catwoman des sixties Eartha Kitt, Sheryl Lee sacrifiée sur l'autel de Twin Peaks, l'anomalie Jennifer Jason Leigh, Jeanne Moreau période fauchée, Rose McGowan avant #MeToo, Tilda Swinton et ses mille visages ou Sean Young, l'androïde grillé de Blade Runner. Voici leurs histoires, intimes et collectives : des trajectoires de femmes qui, dans les films, dans la vie, auront été autre chose que des princesses endormies.
Dans les années 1960, Philippe R. Doumic réalise pour Unifrance 15 000 photographies d'actrices et d'acteurs, de techniciens, de réalisateurs, pour promouvoir le jeune cinéma français. Beaucoup de ces étoiles montantes sont devenues des stars (Catherine Deneuve, Jean-Paul Belmondo, Brigitte Bardot...) et nombre des images de Philippe Doumic ont depuis fait le tour du monde. Mais le nom du photographe est demeuré dans l'ombre. Cet ouvrage entend rendre hommage à l'homme et à l'oeuvre à travers 200 photographies de personnalités du cinéma, qui saisissent une époque autant que des regards d'une force rare. Il raconte aussi leur histoire et celle d'un homme trop discret, sous la plume d'un témoin unique, sa fille Laurence Doumic-Roux.
Un classique des livres de cinéma, Faire un film se présente à la fois comme les mémoires de Sidney Lumet et comme un guide possible pour aspirant réalisateur. En 13 chapitres, il décrit minutieusement toutes les étapes de la conception d'un film, de la lecture du scénario jusqu'à la sortie en salles. Pour cela, Lumet s'inspire de sa propre expérience, en nourrissant son propos d'anecdotes liées aux tournages de ses films. Il s'agit avant tout du témoignage d'un cinéaste chevronné qui pousse le lecteur désireux de tourner un film à se poser les bonnes questions, comme par exemple :
Comment choisir un script ? Quelle focale, quel angle de caméra adopter pour telle ou telle scène ?
Sans jargon et avec humour, Faire un film mêle habilement conseils, analyse, récit, descriptions et anecdotes.
Trois Sissi en trois ans. De quoi propulser cette adolescente au rang d'icône à tout juste 18 ans. D'un internat religieux très strict aux projecteurs, de l'adoration excessive du public à l'indifférence ou l'acharnement, de films kitchs à l'eau de rose au grand cinéma d'auteur des années 70, la vie et la carrière de Romy Schneider sont une succession de grands écarts. Eternelle insatisfaite, elle remet son titre en jeu dans chacun de ses rôles (prostituée, soeur incestueuse, actrice ratée ou femme brisée), dans lesquels elle se jette à corps perdu, quitte à y laisser un peu d'elle-même. La femme et l'actrice se confondent désormais. A tel point que son statut d'icône dépasse aujourd'hui sa seule carrière et vient auréoler sa vie de femme et son destin tragique.
John Cassavetes expose en détail les étapes de réalisation de chacun de ses films, de Shadows à Love Streams, ses influences, ses méthodes et ses rencontres. Le livre alterne ses propos avec ceux de Ray Carney, qui viennent à la fois les resituer, les compléter et parfois les discuter.
Salué à sa sortie aux États-Unis en 2001, Cassavetes par Cassavetes est, selon le cinéaste Harmony Korine, le « meilleur livre jamais écrit sur le cinéma ».
De son apprentissage à ses plus grandes réussites, en passant par ses échecs qu'il expose avec la même humilité et le même humour, William Goldman raconte ici les grandes étapes de sa carrière, film après film. Ce livre s'adresse aux scénaristes débutants ou confirmés, mais aussi à tous ceux qui veulent revivre un certain âge d'or d'Hollywood à travers les yeux d'un de ses plus fins observateurs et découvrir comment naissent les grands films. Goldman nous montre le vrai visage des légendes avec qui il a travaillé, patrons de studio, producteurs, réalisateurs et comédiens, parmi lesquels Laurence Olivier, Paul Newman, Robert Redford, Dustin Hoffman, Susan Sarandon, Michael Douglas, Robin Wright
"La quasi-totalité des productions cinématographiques du monde ont été influencées par les films américains, qui étaient eux-mêmes influencés par les enseignements de Stella Adler. Nous sommes nombreux à l'adorer et nous lui devons beaucoup." Marlon Brando Ce livre nous ouvre la porte de l'école de Stella Adler, actrice et professeure d'art dramatique qui a formé des géants du cinéma, parmi lesquels Marlon Brando, Robert De Niro, Nick Nolte, Warren Beatty... En 22 leçons, elle nous livre les secrets de sa technique et de son art.
Loin d'être un ouvrage théorique, il est conçu à partir d'enregistrements de ses cours et de carnets de notes (réunis par le critique Howard Kissel), et place directement le lecteur sur le banc des apprentis comédiens face à une femme au caractère flamboyant.
Un barbu californien qui fait ses courses en robe de chambre, trois bagnards évadés, un coiffeur silencieux, une photographie de femme sur la plage, un bébé sur le toit d'une voiture... Qui peut évoquer les frères Coen sans que surgissent des scènes et des personnages marquants ?
Mais loin de se limiter à sa dimension formelle, l'oeuvre de Joel et Ethan Coen est encore davantage celle de conteurs qui s'emparent, à chaque film, de la culture populaire américaine :
Musique, cinéma, littérature. Dylan, Preston Sturges, Raymond Chandler, comptent parmi les noms que les deux frères emportent dans leur grande traversée des États-Unis. Dans cette nouvelle édition de leur ouvrage paru en 2013, Marc Cerisuelo et Claire Debru les pistent film par film, de Sang pour Sang (1984) à Macbeth (2021), en s'interrogeant sur leur héritage et l'empreinte qu'ils laissent d'ores et déjà dans l'histoire du cinéma.
« Un essai dense et passionné qui, mêlant allégrement la réflexion théorique (Northrop Frye, Stanley Cavell) et la familiarité (la trilogie des péquenauds, le pognon) mime en quelque sorte la «satire» bigarrée des deux frères.» Positif.
Gena Rowlands habite deux mondes : celui des films de John Cassavetes et celui, plus me´connu et presque antagonique, de la te´le´vision ame´ricaine dont elle fut une pre´sence familie`re depuis les anne´es 1950.
Ce livre retrace sa carrie`re, explore son jeu e´bre´che´, raconte une vie d'actrice a` la manie`re d'un roman a` plusieurs strates, celui d'une actrice, d'un couple et de la féminité.
Comme toutes les autres, elle a modifié son physique pour plaire à Hollywood et joué le jeu des prétendues rivalités entre actrices. Comme toutes les autres, elle avait des jambes magnifiques et un regard de vamp à faire fondre les coeurs. Comme les autres, sa vie sentimentale était aussi incroyable que dissolue.
Pourtant, Marlene demeure unique. La parfaite création cinématographique. Un mythe, dira-t-on. Car le secret de Dietrich, ce qui la différencie des autres, c'est sa voix grave inimitable. Suave et cajoleuse. Celle-ci n'est pas la plus belle ni la plus puissante. Mais la star saura l'utiliser mieux que quiconque pour envoûter le public, se construire une carrière à l'épreuve du temps et vivre quelques aventures rocambolesques.
Dieu dansant rongé par un feu bouillonnant, flamboyant éloge de l'imperfection, Nicolas Cage s'est construit au long d'un parcours aux stupéfiantes incursions, où se croisent Francis Ford Coppola, David Lynch, Werner Herzog, des clowns, des cafards, des baleines, les Beatles, Elvis Presley et Internet tout entier.
Il fait aujourd'hui à l'écran ce que plus personne n'ose faire : déconcerter, rompre, démolir, prendre des risques, essayer, quitte à perdre et sombrer.
Un véritable monstre de cinéma, dans tous les sens du terme, qui depuis quatre décennies ne poursuit qu'une seule voie : la sienne, envers et contre tout.
Lelo Jimmy Batista est auteur, scénariste et journaliste pour Libération. Dans la collection « Capricci Stories », il a déjà publié Robert Mitchum, l'homme qui n'était pas là.
La folle et tragique vie de Marlon Brando.
À peine dix ans et une poignée de rôles. Voilà ce qu'il a fallu à Bud, un gamin du Nebraska, pour devenir Marlon Brando, détrôner Laurence Olivier et se faire une place dans le grand récit américain. Puis quasiement plus rien. Une carrière déclinante, un comportement de plus en plus erratique, une résurrection magnifique mais éphémère (Le Parrain, Apocalypse Now). Comme s'il était arrivé trop tôt au sommet, avant de se laisser inonder par la mélancolie, un sentiment de l'absurde et une envie de disparaître. Réfugié sur son atoll du bout du monde, Marlon Brando posait cette question : combien de temps une star dure-t-elle ?
Ce livre fait le pari qu'une vie se raconte à travers la filmographie d'un grand acteur, une autre vie que celle de la biographie réelle. A travers les films de Chabrol, Haneke, Verhoeven, Breillat, Godard et bien d'autres, Murielle Joudet tente ainsi de recoller les morceaux d'une vie de femme en tant que telle avec tous ses moments : l'initiation sexuelle, le mari, l'amant, la maison, le travail, les enfants.
Que fait Isabelle Huppert de toutes ces étapes "obligées", comment est-ce qu'elle les transforme, les infléchit et les pirate ? L'absence que l'actrice injecte inévitablement dans chaque situation (la plus inédite ou la plus banale) et qu'elle exprime à merveille est ce qui fait sa grandeur.
Il a publié son premier poème à 8 ans, été condamné aux travaux forcés à 15, a menti pour avoir son premier rôle, a été arrêté pour possession de stupéfiants, a giflé Otto Preminger, est devenu ami avec Marilyn Monroe, a chanté avec Elvis Presley, était plutôt pour la guerre du Vietnam et franchement contre certains journalistes, qu'il aurait volontiers enterrés vivants. Mais il l'a fait sans avoir l'air de vraiment s'y intéresser, à la fois complètement dedans et totalement à côté, l'oeil alangui et un sourire en coin.
Éternel vagabond qui se considérait toujours entre deux trains, Robert Mitchum n'attachait que peu d'importance au métier d'acteur. Comme si, malgré le bruit, la gloire et l'agitation, il n'avait jamais été vraiment là.