En 1939, James Agee fut chargé par la revue Fortune d'écrire un article sur Brooklyn pour un numéro spécial sur New York. Son projet fut rejeté à cause d'une divergence artistique, et resta inédit jusqu'en 1968, date à laquelle il fut publié sous le titre " Brooklyn Is: Southeast of the Island: Travel Notes. " Traversant l'arrondissement depuis les brownstones des hauteurs qui dominent le pont de Brooklyn jusqu'aux quartiers louches comme Flatbush, Midwood et Sheepshead Bay qui s'étendent silencieusement vers la mer, Agee a saisi en une quarantaine de pages remarquables l'essence d'un lieu et de ses habitants. Émaillées de fragments d'histoire fascinants, ses descriptions pittoresques, tendres, et si justes de ce qu'il voit, des trottoirs paisibles dans la lumière de l'après-midi à la bousculade des terrains de jeux fréquentés par les immigrants, composent un tableau inoubliable qui demeure vrai et vivace?et qui perdure alors même que Brooklyn évolue.
James Agee est né à Knoxville, Tenessee, en 1909. Après la mort de son père, il a effectué ses études dans différents états des États-Unis, les achevant à l'Université de Harvard. En 1936, le magazine Time-Life lui commande un reportage sur les conditions de vie des pauvres de l'Alabama. Il le réalise en compagnie du photographe Walker Evans. Finalement refusé par le journal, ce texte inclassable, devenu un classique, est publié en 1940 sous le titre Louons maintenant les grands hommes. James Agee est également l'auteur de nombreux autres ouvrages, aussi bien de poésie, de recueils de nouvelles, de romans que d'essais critiques. En 1958, il a reçu le Prix Pulitzer pour Un mort dans la famille, dans lequel il fait écho à son enfance. Il a par ailleurs été un critique de cinéma influent pour les magazines Time et The Nation et a collaboré à l'écriture des scénarii de The African Queen de John Huston et de La nuit du chasseur de Charles Laughton. Il est mort en 1955 d'une crise cardiaque dans un taxi new yorkais.
INEDIT : Publié pour la première fois sous la forme d'un livre, enrichi d'une préface de Jean-Christophe Bailly, ce texte est une célébration classique de l'essence de Brooklyn par un grand écrivain.
Rappelant la sonorité de Hart Crane, de Walt Whitman, et de Thomas Wolfe, cet essai, au même titre que Retour à Brooklyn d'Alfred Kazin et que Un air de New York de E.B. White, est une évocation magistrale du lieu que s'approprient tant de gens. Un classique sur New York, une grande uuvre écrite par l'un des plus grands prosateurs de notre siècle.
" La prose fut le mode d'expression de la maturité d'Agee et la forme qui révéla le mieux son style brillant dont les phrases sinueuses s'élevaient avec grce, plongeaient avec la rapidité des montagnes russes, puis se lovaient autour de l'immuable vérité de la condition humaine... Brooklyn existe est l'un des plus beaux morceaux de prose jamais écrits. " (Time) " Je voudrais essayer de répondre en chantant à l'impressionnante chanson que James Agee a écrite pour célébrer Brooklyn. Son écriture renvoie à celle de Walt Whitman, comme une balle d'amour tirée vers le siècle dernier. Mais s'il est un chanteur, Agee est aussi un peintre. Par le langage, il capture comme par un coup de pinceau le reflet des façades baignées par le soleil des immeubles en brownstone des quartiers de Slope, Heights et Hill, les bardeaux et les stucs de Flatbush et Greenpoint, les graffiti et enseignes commerciales laissés comme des indices pour les futurs archéologues. La touche de son écriture est aussi touchante et mélancolique que celle de Rothko dans ses peintures du métro ou celle de Philip Guston dans les peintures qu'il fait des scènes de rue. " (Jonathan Lethem) PAGE 1
Ce deuxième des trois volumes des journaux de Susan Sontag commence là où s'achevait Renaître, au milieu des années 1960. On y suit le parcours et l'évolution de Susan Sontag dans les mouvementées années 1960, jusqu'au moment où elle acquiert une renommée mondiale en tant qu'essayiste de premier plan, devenant une figure incontournable dans le monde des idées avec la parution de Against interpretation en 1966. Comme Renaître, ce volume mêle notes du quotidien et réflexions sur sa vie intime, sur le monde, la peinture, la musique, le cinéma, et avant tout sur l'écriture, le processus de création, sur ses doutes. Ceci à l'époque de la Beat Generation et de la révolution sexuelle. Ayant abandonné sa carrière académique, Susan Sontag a en effet consacré la période de 30 à 40 ans à écrire et absorber la culture new-yorkaise : elle regarde de nombreux films, assiste à des happenings, visite les ateliers de ses amis Robert Rauschenberg, Paul Thek et Jasper Johns. Susan Sontag relate par ailleurs ses voyages : à Tanger ; à Paris où elle s'installe un temps, rencontre les intellectuels de l'époque, va quotidiennement au cinéma et se passionne pour la Nouvelle Vague ; Prague ; Venise; le Vietnam, où elle part avec une délégation d'activistes contre la guerre: « J'accomplis des actions militantes, dit-elle, sans éprouver de sentiment militant. »). Ce journal accorde aussi une large place à des développements plus intimes, qui portent la marque de ses échanges avec sa psy, Diana Kennedy. Susan Sontag a en effet été très affectée par sa rupture avec la metteur en scène cubaine Maria Irene Fornes. Elle se lie alors avec « Carlotta », une femme dont elle admire l'indépendance, mais avec laquelle elle ne se sent pas totalement à l'aise. Davantage encore, Susan Sontag ne cesse de s'interroger sur la création. Elle évoque, au fil de notes et de listes, ses lectures (Kafka, Robbe-Grillet, Simone Weil, Roland Barthes.), ses projets de livres, ses déceptions, ses difficultés. Elle rappelle aussi son expérience théâtrale dans l'atelier de Peter Brook et de Grotowski à Londres, et la réalisation de ses premières productions cinématographiques en Suède. Cet ouvrage constitue un inestimable document, au sein duquel sont progressivement dévoilés les rouages de la pensée d'une des intellectuelles les plus curieuses de son époque, l'une de celles qui a le plus cherché à analyser, décortiquer le monde qui l'entoure, au moment où sa renommée atteignait son apogée. Il s'agit également d'un remarquable document qui témoigne de la prise de conscience morale et politique d'un individu.
Ann Beattie commença à publier ses nouvelles dans le New Yorker, au milieu des années soixante-dix. Elle fut instantanément saluée comme la voix de sa génération. Son nom devint même un qualificatif : beattiesque. Subtile, nerveuse, dérangeante, Ann Beattie est une observatrice magistrale de l'éclatement de la famille américaine. Les textes inclus dans ce recueil couvrent une génération, de la fin de la guerre du Vietnam à l'après 11 Septembre. Au fil des années, l'auteur promène son regard aigu et sarcastique sur le pays et observe la vie des Américains, décortiquant les rapports entre les gens, en société ou dans le cadre de leur vie privée, entraînant le lecteur dans la traversée d'une époque passionnante où tant de choses ont changé aux États-Unis et dans le monde.
Selon Margaret Atwood, chaque nouvelle de Beattie est « comme un nouveau communiqué du front: nous nous en emparons, impatients de savoir ce qui se passe là-bas, à la lisière du no-man's-land mouvant et aléatoire qu'on appelle les relations impersonnelles. » Faisant preuve d'une maîtrise incomparable de l'art du dialogue et d'un humour percutant, elle livre des regards acérés sur le paysage culturel de son époque.
L'écrivain new yorkais, Nate Piven est une star montante. Après une première vie sérieuse et rébarbative de premier de la classe, suivie de quelques années de vaches maigres, il vient de signer un contrat généreux pour un roman. De plus, il ne cesse d'être sollicité par de nouveaux magazines qui souhaitent le faire contribuer à leurs dossiers. Quant aux femmes, il est entouré des plus belles et des plus désirables : Juliet, reporter économique de haut vol ; Elisa, sa somptueuse ex-petite amie ; et Hannah, que « presque tous considèrent comme gentille et intelligente, ou intelligente et gentille », qui n'a pas son pareil dans les conversations entre amis. Mais lorsque l'une de ces histoires devient plus sérieuse que les autres, Nate est contraint de se demander ce qu'il souhaite réellement.
Pour qui s'est un jour demandé pourquoi les hommes font les choses qu'ils font, Adelle Waldman plonge dans la psyché d'un mâle moderne imparfait, souvent exaspérant - un jeune homme qui porte sur lui un jugement bien au-delà du superficiel, mais qui lutte en permanence avec sa propre anxiété, liée aux femmes. Il a pourtant l'habitude de les laisser tomber d'une manière qui fait de lui un emblème de notre époque. De même qu'il apporte un regard de l'intérieur sur ce qu'un jeune homme pense réellement du sexe, des femmes et de l'amour.
Ce livre prouve que, dans le monde littéraire du XXIème siècle, l'esprit et l'art de la conversation sont loin d'être morts. L'amour l'est-il ?
1980. Jane, brillante diplômée de Harvard, a connu son heure de gloire suite à une interview sur la jeunesse protestataire - dont elle fait partie - qu'elle a accordée au New York Times. Peu de temps après, Jane quitte la ferme du Vermont où elle vivait avec Ben, musicien et poète en herbe, pour s'installer à New York avec Neil, un professeur-écrivain beaucoup plus âgé qu'elle qui décide de prendre en main son éducation. Ceci jusqu'au jour où elle découvre qu'il est marié et, contrairement à ce qu'il prétendait, ne passe pas ses nuits à écrire dans le cabinet de Tyler, son ami vétérinaire. Elle se sépare alors violemment de lui. Deux semaines après cependant, elle part le retrouver chez Tyler. Neil divorce, l'épouse et le couple mène une vie heureuse pendant quelque temps ; Jane est engagée par un réalisateur comme consultante pour le scénario d'un documentaire consacré à la jeunesse déshéritée.
Mais la mort de l'ancien compagnon de Jane vient assombrir cet équilibre apparent. Jane est rongée par la culpabilité, le regret. Quelques mois plus tard, Neil lui annonce subitement qu'il va "disparaître" définitivement. " Bien jeune pour être déjà veuve ", Jane se retrouve seule avec le souvenir des deux hommes qu'elle a aimés, convaincue que son mari ne lui a jamais fait connaître son vrai visage et l'a toujours manipulée.
En une centaine de pages, Ann Beattie déploie un univers complexe où règnent le doute amoureux, la passion, la volonté de survivre, l'ambition, avec une justesse et une ironie subtiles, un sens de la description qui restitue l'atmosphère, le paysage new-yorkais d'une époque révolue et pourtant toujours vivace. Promenades avec les hommes est un bijou finement ciselé, qui continue de hanter le lecteur une fois le livre refermé.
New York, février 2002. Crispin Salvador, écrivain philippin et professeur à l'université, est retrouvé mort dans l'Hudson River. Le rapport de police classe l'affaire comme suicide. Mais, son protégé, l'apprenti écrivain Miguel Syjuco, lui aussi originaire de l'archipel, s'interroge : s'agit-il véritablement d'un suicide ? Qui pouvait en vouloir à Salvador ? Il décide d'enquêter sur le décès de Salvador et sur la disparition Des Ponts embrasés le manuscrit sur lequel ce dernier travaillait depuis plus de deux décennies. Dans ce livre, qui aurait dû être le couronnement de son oeuvre, il explorait la corruption et les scandales au coeur des familles de la classe dirigeante de son pays natal.
Syjuco fait lui-même partie d'une famille proche du pouvoir aux Philippines. Ses parents sont morts tragiquement dans un accident d'avion (un attentat) quand il était très jeune et ses grands-parents, qui jouent eux aussi un rôle important dans la politique de leur pays, l'ont élevé avec ses frères et soeurs. Miguel part donc pour Manille, où il n'est pas retourné depuis sa brouille avec ses grands-parents il y a plusieurs années. En quête de sa propre identité et, sans doute, du père qu'il n'a pas connu, il part sur les traces de son " mentor " disparu, personnage iconoclaste et solitaire, auteur prolifique et rejeté par ses pairs, mouton noir des lettres philippines, dont il écrit la biographie tout en analysant sa propre existence.
La vie de Salvador est ainsi relatée, indifféremment à la première qu'à la troisième personne, à travers sa poésie selon que sont retranscris ses nouvelles, ses interviews, ses romans, ses mémoires, des extraits de blogs, des échanges d'e-mails, ou encore des passages de la biographie de Salvador que Syjuco est en train d'écrire. Ces fragments littéraires se rejoignent pour former petit à petit une réelle épopée : une saga familiale sur quatre générations, retraçant 150 ans d'histoire des Philippines, embrassant révolutions, guerres mondiales, lutte contre le communisme, de la dictature de Marcos jusqu'à la société d'aujourd'hui qui tente de combattre ses propres démons.
Ce roman est tout à la fois la biographie fictive d'un écrivain et le portrait du jeune Miguel, Philippin déraciné et américanisé, qui entretient une relation ambiguë avec son pays d'origine, une peinture d'un pays complexe et attachant, meurtri par une histoire coloniale brutale et toujours en proie à des violences sociales, et une réflexion sur ce l'art de construire un roman. La structure narrative d'Ilustrado fonctionne en effet comme un immense puzzle. À mesure que le roman se déploie, les vies de Miguel et de Crispin, entrecoupées d'extraits des oeuvres de Salvador, finissent par s'imbriquer étroitement en une succession d'effets de miroir. Voyage dans l'Histoire semi-onirique, semi-réaliste, avec des scènes qui se font écho à travers les époques, aux Philippines et ailleurs. Porté par le souffle du récit, envoûté, le lecteur bascule d'un temps à l'autre, d'un personnage à l'autre, cherchant le réel dans la fiction et la fiction dans le réel, se forgeant finalement sa propre vérité.
Dans ce recueil de quinze nouvelles, A. Beattie décrit avec précision, humour et gravité les différentes strates de la classe moyenne américaine, toutes générations confondues.
Dans ce premier recueil haletant, Arlene Heyman, psychiatre et psychanalyste new-yorkaise, brise les tabous, décrivant ce qui se passe réellement dans l'esprit des gens, dans leur lit et leur relation avec autrui. Cru, tendre et drôle, sincère et parfois choquant, Tard dans la vie, l'amour est une exploration féroce du chaos et de la beauté de la vie.
Une femme se plie à certains rites sexuels avec son second mari, tout en partageant son lit avec les fantômes de son passé amoureux. Une superbe étudiante des Beaux-Arts s'embarque dans une liaison avec un artiste marié très connu, beaucoup plus âgé qu'elle. Une femme mûre est confrontée au déclin de sa mère, autrefois séduisante et encore autoritaire ; leur relation tendue provoque des sentiments à la fois humiliants et bouleversants. Un homme découvre que son père est mort dans les bras de sa maîtresse et se demande ce qu'il doit faire du corps. Un garçon en cours de maths fantasme sur les seins d'une camarade et s'inquiète pour son père hospitalisé, tandis que les tours jumelles s'écroulent sous ses yeux...
Falls, en Caroline du Nord. Traversée par la rivière Lithium, cette ville imaginaire - pourtant tout à fait réaliste - constitue le décor commun des trois novellas réunies dans ce volume. Un microcosme où l'on perçoit les échos du vaste monde : les habitants se débattent dans des situations existentielles complexes voire dérangeantes, les rumeurs vont bon train...
« L'écriture d'Allan Gurganus est parfaite. Son récit a des allures de choeur grec, comme si Sophocle était en Caroline du Nord. [...] Ceux qui restent est remarquable, non seulement grâce à la voix talentueuse d'Allan Gurganus, mais aussi grâce à la force du dénouement proposé pour chaque histoire. » John Irving « Allan Gurganus est notre magicien du verbe. [...] Chacune de ses phrases recèle une surprise. Mais l'éblouissement qu'elles provoquent ne nous empêche pas de scruter les profondeurs de la sensibilité humaine. » Edmund White