1953. Voici Joseph Kessel dans un Kenya en révolte contre la Couronne d'Angleterre. Puis sur la route des Merveilles, du lac Victoria au Kilimandjaro, entre colons et guerriers Masaï. Partout, il s'émerveille d'une poésie à l'état brut, d'un paysage spirituel de tapisserie de Dame à la Licorne:«Quand je me réveillai une minuscule gazelle couleur de châtaigne, avec deux aiguilles pour cornes et deux dés de velours pour sabots, se promenait autour de mon lit...» Des reportages exceptionnels, à l'origine du Lion.
Ce livre est d'abord l'histoire d'une rencontre, celle entre l'auteur, Sorel Eta, et les Aka. Sorel Eta est un Bantou, ethnie dominante qui, comme il le raconte lui-même, méprise habituellement les Pygmées Aka, peuple de la forêt du Nord-Est de la République Démocratique du Congo. C'est donc d'abord l'histoire d'amitiés réciproques enjambant les préjugés, de part et d'autre. C'est aussi celle d'une aventure commune car Sorel Eta a créé avec ses amis un groupe musical se produisant à l'international, Ndima. Les Pygmées sont en effet célèbres pour leurs chants polyphoniques, une tradition musicale vocale complexe, basée sur la transmission orale, forme complexe de polyphonie contrapuntique à quatre voix, maîtrisée par l'ensemble des membres de la communauté. C'est enfin la découverte progressive par l'auteur de l'art de vivre en forêt propre aux Aka. À ses côtés, nous découvrons leur art de la chasse et de la cueillette du miel sauvage, leurs croyances, les relations entre hommes et femmes, leur usage de la magie, leur art très particulier de se déplacer plus rapidement que quiconque dans la forêt... Sorel Eta offre ainsi aux lecteurs un condensé d'humanité riche d'enseignements.
L'anthropologue Vincent Crapanzano a fréquenté Tuhami, un tuilier miséreux de Meknès au Maroc, dans les années 1970. Ce dernier se déclarait marié à une démone, une djinniya, laquelle lui menait la vie dure. Mais plutôt que de classer les récits littéralement extraordinaires de Tuhami au chapitre des fantasmagories et élucubrations, l'anthropologue s'est appliqué à les comprendre en profondeur, jusqu'à saisir ce qu'ils réverbéraient de la personnalité exceptionnelle du tuilier, de son monde, de son histoire.
Le récit de l'enquête qui nous est ici livré heurte alors les limites de ce qui est considéré comme le « réel » et se fait la chronique d'une rencontre qui a bouleversé les modes d'écriture sur l'altérité.
Cet ouvrage fondateur n'avait jamais été traduit en français.
L'Arnaque à la nigériane Presque tout le monde a reçu ce mail : on vous propose de toucher l'héritage (quelques centaines de milliers d'euros) d'une expatriée en fin de vie pour peu que vous fassiez une avance de frais sur la transaction. Il finit généralement à la poubelle. Mais l'historienne Nahema Hanafi y a reconnu une forme nouvelle d'escroquerie ancienne et a choisi de mener l'enquête autour de cette malversation. L'arnaque « à la nigériane » provient de pays d'Afrique de l'Ouest, et elle est le fait de cyber-escrocs nommés les « brouteurs ». En décortiquant au plus près ces messages avec autant d'empathie que d'espièglerie, elle identifie là une forme de banditisme social, une capacité à subvertir les rapports d'inégalité du monde postcolonial, signe aussi d'une émancipation du désir d'Europe.
Les anthropologues, bien souvent malgré eux, ont usé et abusé de la notion d'ethnie, sans toujours préciser ce qu'ils entendaient par ce terme. Parallèlement, les médias se sont hâtivement emparés de cette appellation si peu contrôlée pour tenter d'« expliquer » tel ou tel événement de la politique africaine. Encore aujourd'hui, ce terme est utilisé dans les analyses souvent réductrices de certains conflits (ex-Yougoslavie, Rwanda, etc.).
L'ensemble des textes réunis dans ce livre - devenu un classique depuis sa première édition en 1985 - s'efforce, en conjuguant analyses de portée générale et études de cas, de s'interroger sur cette notion controversée à partir de la situation africaine. En effet, il est important de repenser les notions d'ethnie et de tribu, de plus en plus souvent associées à d'autres notions comme celles d'État et de nation. Et il est impératif de revenir sur certaines formes de classifications par trop schématiques et réductionnistes.
« Le terme de Berbère, écrivait Jean Servier, par lequel nous avons l'habitude de désigner les plus anciens habitants de l'Afrique du Nord est, en fait, un terme inadéquat puisque dérivé du grec barbaroi et, par-delà, du sémitique, puis de l'arabe brabra. Il désigne en premier des gens dont on ne comprend pas la langue. C'est une appellation méprisante donnée par un vainqueur à un vaincu ou par un voyageur sûr d'appartenir à une civilisation supérieure.
Ce n'est pas le nom qu'un peuple se donne à lui-même. » Embrassant l'art, la civilisation, la population, la langue et l'histoire, cet ouvrage propose, pour reprendre les mots d'Ibn Khaldoun, « une série de faits qui prouvent que les Berbères ont toujours été un peuple puissant, redoutable, brave et nombreux ».
En l'explorant au prisme de cette singularité, Kofi Agawu dévoile ses structures participatives et communautaires, qui nourrissent l'imagination créative de ses compositeurs et interprètes. Déployée dans les rythmes, les mélodies, l'organisation formelle des sons, elle se décline jusque dans le corps de ses danseurs.
Parce que la musique africaine a toujours protégé son essence sans jamais se refuser à l'accommodation, cet ouvrage nous engage à penser son unité, comme ses ramifications hors du continent : elles sont autant de réponses musicales aux évolutions sociales, identitaires et culturelles du monde contemporain.
Cet ouvrage pose un regard inédit sur la "crise sans fin" que traverse le monde musulman : il éclaire la faillite politique de ces pays par le culte de la virilité, qui affecte non seulement les rapports entre les sexes, mais aussi les relations des hommes entre eux et, fondamentalement, la vie en société. La virilité n'est pas appréhendée ici dans sa dimension érotique, mais dans sa portée politique. Une traversée qui s'ouvre dans l'Arabie préislamique et s'achève avec les talibans afghans, à la fin du XXe siècle, après s'être arrêtée sur l'empire des Steppes, l'empire ottoman, le puritanisme des wahhabites, la révolution khomeiniste, le destin de Saddam Hussein et les tribulations des hommes ordinaires au Maghreb.
Une étude ethnologique de la sorcellerie en Afrique de l'Ouest, s'appuyant sur des enquêtes de terrain réalisées dans cinq pays entre 1994 et 2000. David Signer y décrit la sorcellerie comme un système de croyances à l'impact social réel, qui imprègne la politique mais surtout l'économie, et dont la fonction hautement normative et conservatrice empêche efficacement le développement de la société et de l'individu africains.
En octobre 1994, à Man, une ville de l'ouest de la Côte d'Ivoire, j'ai eu une conversation révélatrice avec un jeune homme du nom de Jean-Claude.
- La sorcellerie, me disait-il, est le plus grand obstacle au développement de l'Afrique.
Je demandai :
- Que veux-tu dire ? La sorcellerie ou la croyance en la sorcellerie ?
- La sorcellerie... la sorcellerie est une réalité. Dès que quelqu'un s'élève, a du succès, est supérieur à la moyenne, il risque toujours d'être ensorcelé. La jalousie est présente partout. Elle conduit à la peur, au découragement, à la paralysie de chaque initiative. Les sorciers « mangent » de préférence ceux qui ont du succès, les diplômés, les étudiants, les jeunes talents prometteurs... ayant une nette prédilection pour un membre de leur propre famille. Ils se le partagent et, la fois suivante, c'est à un autre d'offrir quelqu'un de son entourage. Et ainsi de suite. Si, une fois, tu partages le repas, tu as une dette. Si tu ne sacrifies pas l'un des tiens, c'est sur toi que cela retombe.
Cet ouvrage est le résultat d'une enquête de terrain et s'inscrit dans une anthropologie des sexualités anthropologie de la domination et des résistances. L'objectif était d'appréhender la manière dont se construisent les identités homosexuelles au travers d'espaces divers : les réseaux sociaux numériques, les espaces publics, les lieux associatifs. L'essentiel du matériel analysé lors de cette enquête repose sur la rencontre de divers groupes de pairs, le recueil d'entretiens formels et informels et l'observation participante. J'ai choisi d'interroger l'exploration individuelle et collective d'expériences liées à la découverte pratique et identitaire des homosexualités au travers de relations sexuelles, amicales, amoureuses. Les espaces dans lesquels est réfléchi cette pluralité sont ceux d'Internet et de la ville.
Avoir une vie sociale liée à une identité homosexuelle choisie nécessite d'« habiter » les normes majoritaires autrement.
C'est de cet élan dont il est question tout au long de ce travail et surtout dans la dernière partie. En effet, si les identités homosexuelles sont plurielles les « textes cachés » leur correspondant le sont aussi. En cela les points de vue, divergent, se complètent, s'excluent et l'on peut constater une certaine hiérarchisation au détriment des garçons de classes populaires qui se voient la plupart du temps stigmatisés en dehors d'une identité homosexuelle valorisante. Le croisement entre origines sociales et genre efféminé construit une sorte de continuum de positions et placent idéalement les hommes de classes moyennes masculin dans une identité homosexuelle valorisée au détriment des hommes efféminés de classe populaire. D'une certaine manière, ils sont racisés et sujet à un racisme de classe.
La littérature ou la pornographie participe à cette racialisation des identités puis une racisation des comportements dans le cadre de relations sociales amicales et surtout amoureuses. Néanmoins, cette racisation n'est pas une fatalité dans toutes les situations et certains utilisent la racialisation portée à leur égard dans le but de poursuivre un objectif. D'où l'intérêt de lire la création et la préservation des « lieux intérieurs » comme l'espace de la marge car plus qu'un espace géographique ces espaces sont des lieux d'inventions, de ré-vision des normes majoritaires. C'est à partir d'eux que le politique revêt une autre forme et génère des forces pour interpeller les injustices promulguées par l'État. Bien plus que la formation d'une communauté, il s'agit de communauté momentanée ou plus exactement de groupes de pairs à travers lesquelles s'élaborent des identités multiples.
Les Mursi sont connus du grand public pour le labret que les femmes insèrent dans leur lèvre inférieure. Mais ce labret relève d'une esthétique qui reste à découvrir et à décrire. Un jeune chercheur et photographe élève de Descola s'intéresse à leur pastoralisme original, qui se caractérise par une multitude de pratiques esthétiques. Ces pratiques sont omniprésentes, tout comme les vaches : quand, par exemple, de la bouse recouvre un visage, ou quand des bras levés vers le ciel suggèrent des cornes.
L'étude de l'esthétique sociale des Mursi présente un enjeu de fond aussi bien que de forme. Les pratiques esthétiques des Mursi ne s'ajoutent pas aux interactions, elles sont les interactions. De ces interactions l'auteur dégage et décrit des faits institutionnels relevant du collectif : les classes d'âge, les rituels et le politique.
Prémonition de certains pays non encore reconnus et premier discours sur l'irruption de l'être arabe dans le monde contemporain, Les Arabes a été édité pour la première fois en 1959, puis actualisé par l'auteur en 1973 et en 1979. En Algérie, en Egypte et ailleurs, sociétés et pouvoirs basculent, mais Jacques Berque sans cesse cherche à cerner l'éclatante volonté de vivre, en même temps que l'interrogation d'une jeunesse hantée par l'aliénation et le refus.
Andalousies est la leçon de clôture de Jacques Berque au Collège de France, où il a détenu la chaire d'histoire sociale de l'Islam contemporain de 1956 à 1981. L'écrivain réaffirme à cette occasion la dynamique sociohistorique qui sous-tend sa méthodologie, et appelle avec force au dialogue entre les peuples.
« Ce sont les Africains les plus pauvres qui migrent vers l'Europe. Les guerres de religions déstabilisent l'Afrique. Le contrôle social est si fort qu'il décourage les initiatives et favorise la violence. L'agriculture africaine est archaïque et figée. Les agriculteurs familiaux subsahariens sont dans l'incapacité de nourrir les villes. Le chaos urbain est alimenté par une urbanisation galopante. Les Africaines sont soumises et participent peu au développement.» Qui n'a pas entendu ou lu ce florilège d'idées reçues sur l'Afrique subsaharienne?
En 2015, l'optimisme économique est de mise et a braqué le regard sur de nouveaux thèmes : de « l'Etat fort » à la « bonne gouvernance », de la nécessaire « accumulation » à l'irruption des « classes moyennes », de la « société civile» à l'urbanisation modernisatrice. Cela s'accompagne de normes de perception nouvelles issues du courant libéral : individualisme, malthusianisme démographique et écologique, compétitivité et attractivité fiscale, climat des affaires, etc.
L'afro-pessimisme n'a pourtant pas disparu. Il s'est nourri de la montée en puissance de l'islamisme radical et s'appuie toujours sur une analyse de l'archaïsme des mentalités et des comportements rétrogrades. Incompréhensions et peurs cohabitent avec arrogance ou mépris. L'Afrique est ainsi criminelle ou victime, gagnante ou dynamique.
Pourquoi les Africains restent-ils encore pauvres dans une Afrique très convoitée ? Le passé permet-il de construire le présent ? Mentalités rétrogrades et comportements irrationnels seraient-ils à l'origine du mal développement ? Doit-on miser sur une urbanisation prédatrice au détriment de campagnes archaïques pour le développement? De quels changements l'Afrique est-elle porteuse et quels en sont les acteurs ?
A partir des 50 idées retenues, la nouvelle édition de cet ouvrage repensée et actualisée, répond à ces questions en utilisant le savoir acquis pour identifier la part de vérité et d'erreur qu'elles peuvent receler. Sans complaisance, mais avec lucidité.
Au Maroc, l'expression « filles qui sortent » désigne celles qui se prostituent. Des délires adolescents à la professionnalisation, Les Filles qui sortent analyse la quête de respectabilité de ces jeunes femmes qui se heurtent à un ordre social autant que moral.
Au Maroc, l'expression « filles qui sortent » désigne celles qui fréquentent les night-clubs et les bars la nuit pour gagner leur vie. Au-delà du fait prostitutionnel, le « sortir » renvoie aussi plus largement aux distances qu'une partie de la jeunesse féminine des classes populaires prend avec les normes, la moralité et la respectabilité. Loin d'être confiné à la marginalité, le sortir joue sa partition dans les métamorphoses de l'ordre sexuel et intime dans un contexte d'essor de l'économie du divertissement et d'accroissement des inégalités. Y émergent de nouvelles valeurs qui remettent en cause les régimes moraux et juridiques tout en réaffirmant l'ordre hétérosexuel.
Le Maroc Histoire & Civilisations "La France est l'amie du Maroc" - "Le Maroc vit du tourisme" - "Le vrai Maroc, c'est les villes impériales, pas Casablanca !" - "Les Marocains sont différents des Algériens" - "La monarchie marocaine tient par la force" - "Les Marocains sont tolérants"...
Issues de la tradition ou de l'air du temps, mêlant souvent vrai et faux, les idées reçues sont dans toutes les têtes. L'auteur les prend pour point de départ et apporte ici un éclairage distancié et approfondi sur ce que l'on sait ou croit savoir.
Pierre Vermeren est maître de conférences en histoire du Maghreb contemporain à l'université Paris I. Auteur de nombreux ouvrages consacrés au Maroc, il a enseigné plusieurs années au lycée Descartes à Rabat. oeil de la France en Afrique, passerelle avec le monde arabe, le Maroc a toujours bénéficié d'une grande sollicitude de la part de la France qui, au travers de ses élites politiques et artistiques, a aussi largement contribué à ce Maroc des "idées reçues" que l'auteur décrypte ici.
Extrait du livre :
"La France est l'amie du Maroc." Tant auprès de la droite que de la gauche, nous n'avons que des amis, que nous estimons et qui nous estiment.
Hassan II, roi du Maroc, Le Monde, 3 août 1988 La vision française du Maroc est un curieux mélange de romantisme, d'idéalisme, de nostalgie, mais aussi de réalisme et d'intérêts bien compris. Cette construction est très largement politique, dans la mesure où les élites françaises se sont appliquées, depuis la fin du XIXe siècle, à "vendre" le Maroc au bon peuple de France. Eugène Etienne, député "algérien" d'Oran avant 1914, et le "comité du Maroc" se sont efforcés de justifier l'agressivité économique et militaire préparant la colonisation. Qu'il devait être beau et glorieux l'Empire chérifien, pour risquer de provoquer une guerre avec l'Allemagne ! Puis le traité de Fès, qui instaura en 1912 le protectorat français sur le Maroc, se prêta à une formidable opération de propagande de la part de Lyautey, son concepteur.
Toutefois, la parole lyautéenne ne suffit pas à déclencher une ruée vers ce pays, comme en 1848 celle de l'or en Californie. Il faut détourner vers le Maroc migrants, capitaux, investisseurs, touristes et polygraphes, en provenance des départements d'Algérie. On "vend" aux Français le Maroc, en magnifiant ses combattants héroïques, ses Berbères farouches, ses "féodaux", ses médinas profondes, son sultan francophile, etc. Il fallait faire oublier la guerre du Rif (1921-1925), la crise des années trente, les revendications nationalistes, ou la "duplicité" nationaliste du sultan Sidi Mohammed (futur Mohammed V).
Une fois arrachée son indépendance en mars 1956, le Maroc fut érigé en havre de paix. Le contraste avec une Algérie révolutionnaire, engagée dans un long combat pour rompre sa dépendance avec la France, plaidait en sa faveur. Qu'il était bon d'être affecté au Maroc pour effectuer son service militaire, plutôt que dans les djebels algériens (l'armée française quitta le Maroc en 1961) ! De surcroît, depuis 1961, le jeune Hassan II n'a plus les préventions de son père Mohammed V à l'égard de la France, qu'il avait dû subir et affronter vingt ans durant. Hassan II a choisi l'alliance occidentale. La France, morigénée par l'Égyptien Nasser, traitée de haut par les Algériens Ben Bella et Boumediene, bousculée par le Tunisien Bourguiba, peut compter sur la fidélité d'Hassan IL "Notre ami le roi", à l'intelligence politique établie, devient l'ami des heures heureuses et des moments difficiles. Oeil de la France en Afrique, passerelle avec le monde arabe, intermédiaire entre Israël et l'Islam, le Maroc se rend indispensable. Une partie des élites françaises prend ses habitudes dans ce pays, lieu de détente garanti. Une fois retombées les affres de l'affaire Ben Barka (octobre 1965), qui empoisonnèrent les relations entre De Gaulle et Hassan II, le Maroc prit, à partir des années soixante-dix, des airs du Cuba de Batista pour les dirigeants français, pour le meilleur et pour le pire. En retour, la France ne mégota ni son soutien ni ses aides. Cette "Marocofolie" post-coloniale (quoique le terme date des années vingt) eut des nécessités de Guerre froide, mais elle s'établit sur des intérêts réciproques bien compris.
La zaouïa, au Maghreb, constitue un lieu de culte partagé, parfois syncrétique entre paganisme, islam et tourisme religieux. La question de la sauvegarde de ce petit patrimoine architectural, traditionnel, diachronique, souvent d'origine berbère, se pose différemment selon les pays. En Afrique du Nord, certaines zaouïas (Maroc) drainent chaque année des milliers de visiteurs et de fidèles. En Tunisie, cultes et pélerinages attachés à ces lieux sacrés font à nouveau débat depuis le printemps arabe.
Les auteurs se penchent sur le cas de la zaouïa Sidi El Kantaoui, établie dans la zone touristique d'El Kantaoui, au nord de la ville de Sousse.
« Je vous emmène à Bello-Tounga, en pays dendi, dans le petit village de pêcheurs qui m'a vu naître. Nous sommes au bout du monde, à l'extrême nord du Bénin, sur la rive droite du fleuve Niger.
Réputés dans toute l'Afrique de l'Ouest pour leur savoir-faire dans la prise en charge des maladies mentales, les Dendis sont inséparables du fleuve. Cette proximité avec l'esprit de l'eau - la déesse-mère Harakoye - leur confère une place particulière à la onction du religieux et du soin.
Je vous convie ici à un rituel thérapeutique de renaissance, une couvade appelée Danfou, littéralement «mettre dans la case» ».
Moussa maman Bello
Le terrain ethnographique plonge le chercheur dans un espace d'altérité et d'engagement qui le confronte inévitablement à des questionnements (et à des doutes) sur sa posture, ses choix méthodologiques, ses dilemmes éthiques. L'art de l'ethnographie tient dans la capacité du chercheur à s'adapter en permanence à l'imprévisibilité de son terrain grâce à l'exercice de la réflexivité (retour sur soi et sur son terrain).
Cette confrontation au monde de l'autre et ces allers retours perpétuels entre le terrain et la réflexion, interpellent des expériences à la fois émotionnelles, physiques et intellectuelles qui ne peuvent se transmettre sous forme de règles ou de recettes toutes faites mais livrent une myriade de pratiques méthodologiques.
La richesse de ce livre réside également dans la diversité des terrains du Maroc contemporain : du Haut-Atlas au grand Casablanca, d'El Hajeb à Tanger, de Nador à Meknès, en passant par le Rif central et par l'intimité du foyer des couples mixtes installés au Maroc. C'est autant le monde des ouvrières, des adeptes du soufisme, des résidents d'un quartier d'habitations informelles, d'une communauté berbère vivant au sein d'une montagne, de la copropriété, des phénomènes participatifs, de la gestion du patrimoine, de la mixité conjugale, de la drogue et de la précarité sociale que ce livre nous fait découvrir.
Ces histoires rendues vivantes à travers les récits passionnants des auteurs nous apparaissent comme un excellent outil pédagogique permettant aux étudiants d'acquérir les « ficelles du métier », aux chercheurs de poursuivre leurs réflexions sur les questions méthodologiques inévitablement renouvelées lors de chaque terrain ; enfin, au grand public d'approcher la grande diversité sociale du Maroc d'aujourd'hui au-delà des représentations toutes faites.
La drummologie dans sa définition se perçoit comme l'étude des tambours parleurs africains, notamment du peuple Akan élevé à la connaissance transversale des aspects sociologiques, anthropologiques, culturels et historiques. Véritable instrument musical de communication, ce tronc-tambour dont elle découle, est la marque de l'existence du Dieu vivant qui transmet la parole et met l'homme au coeur du processus de sa propre réalisation. Elle jouit, de ce fait, de multiples fonctions dans la société.
Le vili, langue maternelle dans le Kouilou, est menacé d'extinction. Cordon ombilical de la société Loango, legs culturel des ancêtres, cette langue mérite d'être sauvegardée et pérennisée par les générations présentes et futures. Cet ouvrage est un outil précieux pour saisir la culture et l'histoire du Kouilou.
Le 7 janvier 2013, s'est tenu à Rabat un colloque sur les communautés juives du sud du Maroc, considérées comme les plus anciennes de ce pays.
Réunir les contributions des participants, universitaires et spécialistes, tenait au coeur de chacun.
La singularité de cet ouvrage réside dans l'accentmis, avant tout, sur le concret, le local et le spécifique. Cette approche conduit à appréhender concrètement l'histoire de ces communautés, ancrées dans leur environnement physique et social, certes dispersées,mais pérennes dans une vaste région et au long des siècles.
Toposa et Larim ! Plutôt que d'une oeuvre ethnographique, il s'agit d'un livre de voyage, dans l'espace comme dans le temps. L'auteur a vu dans l'histoire du Soudan une métaphore de son étendue. Cette histoire a remonté le Nil à contre-courant. Nous en connaissons depuis fort longtemps le passé, des pharaons noirs jusqu'à Méroé puis aux royaumes nubiens. Pour les Européens cependant, la partie méridionale du pays n'a émergé que vers la fin du XIXe siècle, c'est-à-dire hier. Ainsi, tandis que le nord du pays plonge ses racines dans la lointaine Antiquité, sa partie méridionale, aux yeux du visiteur qui s'y hasarde, conserve-t-elle les attraits d'un espace à peine exploré. C'est là que s'est déroulée en 1980 une expédition du British Institute in Eastern Africa à laquelle l'auteur eut le privilège de participer. Le Carnet de route de S. Tornay est délibérément inséré entre une Introduction qui évoque à grands traits deux millénaires d'histoire, de Méroé à l'aube du XXe siècle, et une Postface qui prend le relais avec « le Triangle Ilémi, non-lieu de toutes les frontières », première étude en français sur ce curieux rejeton de l'Angleterre coloniale. Cet ouvrage est tout à la fois scientifique et intimiste. L'auteur, qui conçoit son métier d'ethnographe comme celui d'un romancier du réel, a mené une réflexion sur le thème espace, temps et culture. Jugeant l'image aussi importante que le texte, il l'a richement illustré pour donner non seulement un nom mais un visage aux personnages du récit et rendre visibles leur habitat, leurs rituels, leur environnement. Si cette pérégrination nous apprend que les relations entre Turkana et Toposa, Toposa et Larim, demeurent marquées par l'hostilité, nous découvrons aussi chemin faisant que la guerre et la précarité matérielle ne détruisent ni l'exubérance, ni la quête du bonheur. Au fond du dénuement, une sérénité : le secret que les hommes et les femmes de ces contrées lointaines nous offrent généreusement de partager. Dès son titre, l'ouvrage renverse les noires perspectives d'Au Coeur des Ténèbres de Joseph Conrad. En ces années où le public ne reçoit du Soudan que les horreurs du Darfour, il paraît bienvenu de rappeler que l'Afrique est aussi faite de joie de vivre, d'humour et de lumière.
L'anthropologie a longtemps vécu sur l'illusion que le schéma d'interprétation développé par Hubert et Mauss dans le classique Essai sur la nature et les fonctions du sacrifice avait une valeur universelle. Luc de Heusch s'en prend à ce dogme d'un rite de passage entre le profane et le sacré comme aux spéculations de René Girard. Sur la base d'une étude attentive de rituels africains et de leur minutie maniaque, l'auteur, sans s'interdire les comparaisons avec la Grèce ou l'Inde, force à reprendre l'ensemble du phénomène.Il commence par s'interroger sur le choix des victimes animales, qui, le plus souvent, est loin d'être indifférent.Mais l'homme est la victime sacrificielle par excellence lorsque le sort du monde est en jeu. Le roi, formidable machine symbolique, est au centre de la scène rituelle au Swaziland comme dans l'ancien Rwanda. L'auteur examine son destin sacrificiel dans une perspective renouvelée de Frazer qui l'amène à s'interroger sur la mise à mort des dieux:pourquoi le génie de l'eau, l'ancêtre primordial des Dogon, a-t-il été immolé au début des temps, pourquoi son corps dépecé, puis ressuscité, a-t-il servi à construire le monde? Peut-on inscrire le christianisme, religion du sacrifice salvateur, dans cette lignée?Les deux grands systèmes sacrificiels, qu'ils relèvent de la sphère domestique ou cosmologique, obéissent à la logique des transformations; telle est l'hypothèse majeure de ce livre qui jette de nouveaux éclairages sur la pensée qui guide le geste du sacrificateur.
Le livre un autre burundi est conçu pour donner une vision actuelle de la société burundaise à la lumière de repères traditionnels et de rappels historiques majeurs.
Les photographies sont accompagnées de textes extraits du patrimoine oral, proverbes ou berceuses, et de poèmes écrits par des auteurs burundais, inspirés par les images. le burundi est voisin du rwanda, de la tanzanie et de la république démocratique du congo. aujourd'hui, ce petit pays d'afrique est ruiné et isolé par les conflits qui touchent toute la région des grands lacs. l'insécurité, la peur, la vengeance, les effets d'un long embargo, la misère, les camps, le sida, la subsistance dominent le quotidien.
Pourtant, en silence et dans la souffrance, la population survit à ses crises internes autodestructrices. un autre burundi, témoignage des ressources des burundais, vise donc à encourager l'expression de repères communs appartenant au passé, même douloureux, et à envisager l'avenir, porteur d'espoirs de reconstruction, de paix et de réconciliation.