Best-seller après la Bible, Don Quichotte doit son succès international dès sa parution à son pouvoir de guérir la mélancolie, comme l'a conçu son auteur, à plus de cinquante ans. Comme des patients qui passent pour fous, comme l'auteur dans sa propre vie, Cervantès a chargé Don Quichotte, qu'il appelle son fils fou, de mettre en scène les traumatismes traversés de son vivant.
Françoise Davoine fait résonner ce grand texte avec des cas de sa pratique ou des événements de son histoire personnelle. Elle décrit comment les épisodes de crises successives du chevalier errant sont une façon de faire revivre les guerres et l'esclavage de Cervantès lui-même pendant cinq ans au bagne d'Alger, tout comme les crises psychotiques sont des façons de montrer ce qui ne peut se dire dans les silences orchestrés des familles et de la société, autour de traumatismes majeurs. Et en même temps, ces crises de folie indiquent le moyen d'en sortir. Ici le thérapeute est Sancho Pança, qui sait de quoi il retourne pour en avoir eu l'expérience.
Le livre suit donc pas à pas les différents épisodes du Don Quichotte qui ouvrent le champ progressif des batailles, depuis les voiles des moulins et des bateaux sur lesquels Cervantes combattit contre les Turcs à la bataille de Lépante jusqu'à l'épisode des troupeaux de moutons où il voit se dérouler une guerre internationale exactement sur les mêmes fronts qu'aujourd'hui au Moyen-Orient. Puis, quand il a épuisé l'investigation de toutes ces histoires réelles, Don Quichotte prend le maquis dans la montagne. Grâce à son travail littéralement analytique, il va guérir les traumatismes des uns et des autres rencontrés en chemin. Ainsi Don Quichotte, parti seul dans ses lubies au début du livre, finit par réunir à la taverne plus de trente personnes qui, grâce à son travail d'analyste, ont pu renouer des liens.